L’oeuvre de la semaine: un luminaire philosophique

Cindy Wright. Festoon of fruit and fly, 2016. © © de l'artiste et (re)D Gallery Anvers
Guy Gilsoul Journaliste

La vie ne serait-elle, comme le montre cette peinture de l’artiste anversoise Cindy Wright (°1972) que suspendue à un fil ?

Ce double fil, bleu et rouge comme le veut le code électrique, tient une grappe de fruits et de fleurs au bas de laquelle brille une ampoule d’une clarté éblouissante. Aussitôt l’oeil s’attarde, fasciné d’abord par la maîtrise technique qui n’a rien à envier aux peintres anciens. Sur le site de l’artiste, un système de loupe permet d’approcher plus encore des détails jusqu’à percevoir les moindres coups de pinceaux.

Dans un second temps, ce serait plutôt la profusion des images qui nous retendrait et nous inviterait à une autre lecture. Oui, nous voilà au pays des « Vanités », ce genre pictural particulier qui, dans les salons du XVIIe siècle, avait l’art de rappeler aux hommes la précarité de la vie.

Et on retrouve bien dans cette oeuvre qui se présente à la manière d’une grappe compacte et lourde, une iconographie toute imprégnée de symbolisme chrétien : les raisins (la traversée de la croix), l’oiseau (l’âme), les roses (Marie), la mouche (le mal), la courge (le pèlerin) ou encore la grenade (la résurrection).

Mais dans une Vanité, l’essentiel vient de la mise en perspective de l’illusion par une suite de rappels à l’ordre. D’où, la présence de la flétrissure et de la mort aux côtés des plaisirs sensuels. La perruche bleue, oiseau exotique si recherché dans les allégories du XVIe siècle, est un cadavre bagué. Un numéro d’inventaire. Sous l’oiseau, la grenade est éventrée. Plus bas, une mouche s’est brûlée à l’ampoule incandescente alors qu’un escargot menace les raisins.

Mais Cindy Wright va embrouiller les pistes en ajoutant des éléments inattendus dans ces allégories séculaires. Ainsi la présence d’un ananas encore protégé par son emballage grillagé ou encore celle d’une pelure de banane déjà noircie… A chacun dès lors de faire de cette peinture, un luminaire philosophique.

Après Anvers, les oeuvres de Cindy Wright rejoindront la galerie De Buck à New-York.

Anvers, (re)D Gallery. Mechelesesteenweg 4. « Will it bloom? » Jusqu’au 14 janvier. Du Ma au Sa de 14 à 18h. www.redgallery.be

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