L’oeuvre de la semaine : « Tant que je résiste, je vis »

Josh Smith, More to say, 2019. C de l'artiste et Xavier Hufkens Gallery Brussels. © Xavier Hufkens
Guy Gilsoul Journaliste

Sur fond de paysage brûlé, devant la nuit annoncée par le disque solaire rouge sang, s’approche, frontale, la silhouette de la faucheuse. Comme le veut la tradition, sous la cape et la capuche, le corps est une absence.

A l’heure de la peste noire, la mort était un squelette dont Bruegel fit un effroyable cavalier accroché à un cheval décharné. Dans la série d’estampes « Les simulacres », Hans Holbein rappelle la menace aux hommes distraits par leurs activités quotidiennes alors qu’au XVIIe siècle espagnol, Juan de Valdes Leal la dépose au centre des vanités clinquantes. Parfois, la faucheuse monte un dragon ailé (Böcklin), parfois, le squelette fait place à un ange séducteur (« La mort et le fossoyeur » de Carlos Schwabe). Josh Smith (°1976) reprend l’iconographie classique mais semble davantage situer l’enjeu sur un terrain révélé par le cinéaste Ingmar Bergman dans le « Septième sceau ». Souvenez-vous. La mort, dans un paysage de plage vide s’approche du chevalier qui, afin de retarder l’heure fatale, propose une partie d’échecs en lui disant : « Tant que je résiste, je vis ». Nous voilà au coeur du propos même si le titre générique de cette série de peintures, « Finding Emo », renvoie au revival d’une musique Punk Hardcore » des années 80 riche en pouvoirs cathartiques. De ceux qu’offrent la gestuelle vengeresse et la précision des coups lancés. En bref, les pouvoirs du peintre peignant et se battant contre le sablier renversé comme Edward Munch dans « Le Cri », comme Pollock, comme tant d’autres. Ici, à la plage vide de Bergman se substitue le trop plein de végétaux dressés mais épuisés, à la partie d’échecs, les accords chromatiques contrastés, à la blancheur du non-visage de la mort chez Bergman, son alter égo noir. Noir come, justement, la musique envoûtante du groupe rock américain « I am non longer afraid to die ».

Bruxelles, Galerie Xavier Hufkens. 6 & 107 rue Saint-Georges (1050). Jusqu’au 13 juillet. Du mardi au samedi de 10h à 18h. www.xavierhufkens.com

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