L’oeuvre de la semaine: De fil et d’étoiles

Guy Gilsoul Journaliste

« La bête », longue de plus de 25 mètres, flotte, immobile par-dessus nos têtes. Difficile de la décrire, d’en percevoir des parties reconnaissables.

Une patte, un ventre, une tête… Elle ne possède rien de tout cela et pas davantage de crocs, de pinces ou de cornes pointues. Peut-être des ventouses, d’innombrables petites bouches, de vulves, de cratères dispersés. Poulpe géant alors ? Sans doute mais alors de nature féminine tant le rose l’habille et le rouge et les perles. On ne saura rien de son corps sauf peut-être la présence de deux seins ivres de rires et d’étoiles.

Il lui manque un squelette qui en délimiterait les parties de manière claire. Elle est un tout insécable, organique et si l’on en croit sa créatrice, la portugaise Joana Vasconcelos (°1971), elle appartient à la race des Walkyries, ces vierges guerrières volant par-dessus les champs de bataille, distribuant la mort et emmenant l’âme des héros jusqu’au palais d’Odin. Dans l’exposition, la première de cette envergure en Belgique, une autre de ces créatures plane à quelques mètres alors que, des miroirs, surgissent des apparitions serpentines. L’étrangeté de l’oeuvre vient aussi des matériaux et des techniques utilisées. Il n’y a là que velours, cotons, taffetas, fils de laine et de soie, guirlandes lumineuses, dentelles et billes de verre enfilées. Autour de l’artiste, travaille toute une équipe de jeunes femmes, presque une confrérie.

Elles cousent, découpent, tissent, crochètent, tricotent et assemblent. Ce petit monde d’artisanes donne vie à l’imaginaire débordant et à l’insatiable gourmandise créatrice de Vasconcelos. On pourra bien sûr évoquer le parti pris de l’artiste en faveur des traditions locales et du savoir-faire des femmes mais le rire de cette Walkyrie (l’artiste ou l’oeuvre ?) l’emporte sur toute autre approche qui ne peut qu’en amoindrir la puissance communicative. Voici peu, l’artiste portugaise avait habillé le château et les jardins de Versailles. A Venise, elle avait métamorphosé un bateau…

Bruxelles, La Patinoire Royale. 15 rue Veydt (1060). Du Ma au Sa de 11h à 13h et de 14h à 19h. Jusqu’au 25 mars. www.lapatinoireroyale.com

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