Critique scènes : Insoumissions

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Estelle Spoto
Estelle Spoto Journaliste

Créé en ouverture du festival Pays de Danses à Liège, B4 Summer, le nouveau solo de Mercedes Dassy, est de passage à Bruxelles à la Balsamine. La jeune chorégraphe y emprunte d’autres chemins que la danse pour interroger l’indocilité.

Avouons-le d’emblée : on sort de B4 Summer avec une frustration, celle de ne pas avoir vu Mercedes Dassy danser. Ou si peu. Juste quelques minutes dans la cinquantaine que dure son nouveau solo, succédant au tant acclamé i-clit (toujours en tournée). C’est que Mercedes Dassy est une interprète un peu à part dans la scène de la danse contemporaine belge, qui impose un style singulier, puissant, très incarné. D’une force capable de redonner foi en la danse à ceux qui l’auraient perdue.

Mais, alors que tout le monde l’attend au tournant en tant que chorégraphe, elle décide de ne pas répondre à l’injonction « danse ». « Danse puisque que c’est ce que tu fais, danse puisque c’est ce que tu es. » On a vu la même non-obéissance chez la danseuse et chorégraphe sud-africaine Mamela Nyamza, dans son secouant duo De-Apart-Hate. « Vous vous attendez à ce que je danse, mais je ne danserai pas. Et au contraire, je vais même rester immobile, exagérément, provocativement longtemps. »

Cette insubordination dans la forme -qui emprunte dès lors ici des détours par le mime, le jeu, le chant, voire la lecture et le maquillage- fait écho à l’insubordination de la femme contemporaine, à qui il est demandé d’être tout à la fois sportive et mère (il est certainement plus facile pour un homme de combiner paternité et championnat de natation), battante et sophistiquée, intelligente et sensuelle. Une superposition traduite dans les costumes conçus par Justine Denos, où se surimpriment Lara Croft et les Spring Breakeuses d’Harmony Korine, un ventre de grossesse, l’armure du samouraï et la fourrure de la pépée.

Mercedes Dassy explore ces multiples facettes dans un ensemble décousu, qui s’égare aussi dans les artifices techniques menant au tableau final. Le début était pourtant prometteur, avec cette glissade sonore passant d’un canapé gonflable à une meute de chiens, chiens soumis qui gémissent et chiens dominants qui grondent. « Tous ces chiens gros pour moi c’est rien, j’suis le lion du lieu », chante le rappeur masqué Kekra dans la bande son. Mercedes Dassy est la lionne. Et si ce B4 Summer ne convainc pas, sa détermination et son audace ne peuvent que soulever les applaudissements.

B4 Summer : Jusqu’au 8 février à la Balsamine à Bruxelles, www.balsamine.be ; le 3 avril à la Maison Folie à Mons, www.surmars.be

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