Critique | Scènes

Critique Scènes: Pauvre George riche

George de Molière, sacré Meilleur spectacle © Théâtre Varia

Titre - George de Molière

Mise en scène - Mathylde Demarez, Ludovic Barth

Compagnie - Clinic Orgasm Society

Lieu - Théâtre Varia

Casting - Yoann Blanc, Clément Thirion, Olivia Stainier, Raphaëlle Corbisier, Eline Schumacher, Adrien Desbons, Grégory Duret,

Estelle Spoto
Estelle Spoto Journaliste

Connue pour sa folie sans borne, la Clinic Orgasm Society pare George Dandin de Molière de moutons en tulle blanc, de rock-star en bagnole et d’hommes sauvages carnavalesques à sonnailles. Et rend à cette langue du XVIIe siècle toute sa magie. Formidable.

Après plus de 20 ans d’activités, la Clinic Orgasm Society menée par Mathylde Demarez et Ludovic Barth (révélée par le conte trash inversé J’ai gravé le nom de ma grenouille dans ton foie) voulait changer, trouver de nouveaux processus de travail. D’où l’idée de mettre pour la première fois en scène un texte existant. De préférence une comédie. Leur choix -au départ pas spécialement lié aux célébrations des 400 ans de Molière cette année – s’est porté sur George Dandin, comédie-ballet créée à Versailles en 1668, sur la musique de Lully et contant les mésaventures de son héros éponyme, riche paysan qui voulut s’élever au-dessus de sa condition en épousant, contre son gré, une jeune fille de la noblesse provinciale. « George Dandin, vous avez fait une sottise », dit-il d’emblée à propos de lui-même. La suite de la pièce lui donnera mille fois raison.

Loin de la récente version-reconstitution de Michel Fau, la Clinic fait joyeusement péter tous les cadres de Dandin, multipliant les anachronismes au point que l’intrigue sort du temps, et intégrant – mais quelle bonne idée – à l’intrigue la pastorale présentée à la création, ce qui vaut à la scène d’être peuplée de bergers et de bergères et d’un petit troupeau de moutons au pelage de tulle, aux oreilles mobiles et aux bêlements intempestifs.

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Pour porter l’exubérance voulue par le duo Demarez/Barth, il fallait une solide équipe. Yoann Blanc est un parfait Dandin dindon de la farce ; Clément Thirion (qui signe aussi les chorégraphies, c’est une comédie-ballet) campe un Monsieur de Sotenville à voix fluette et coupe mulet ; Olivia Stainier est une Madame de Sotenville dont la diction rappelle furieusement Danny Boon lisant des romans Harlequin ; Raphaëlle Corbisier est la jeune Angélique mal mariée ; Eline Schumacher et Adrien Desbons sont les domestiques Claudine et Lubin ; et pour Clitandre, glam jusqu’au bout du pénis, il fallait bien l’aura de Grégory Duret, alias DJ Petit Piment, blanc mais star en Côte d’ivoire grâce à son tube Pamela la Brouteuse, qui apporte à l’ensemble une petite touche afro électrisante.

Ajoutez à cela une ambiance carnavalesque dopée par des hommes sauvages empruntant aux Babugeri bulgares, aux Sonaggiaos sardes et aux trapajones des Pays Basques (ces costumes incroyables signés par Nina Lopez Le Galliard), des allusions à travers les siècles à la problématique du consentement, Frédéric Becker et Catherine De Biasio en prime pour la musique live, puis bien sûr la langue de Molière, intacte, qui prend ici toute sa saveur et son charme ancien (ces « Corbleu », « peste soit du maroufle »…) , et vous comprendrez pourquoi ce George de Molière est incontournable.

George de Molière: jusqu’au 30 avril au Théâtre Varia à Bruxelles, www.varia.be ; du 3 au 5 mai au Théâtre Le Manège à Mons, www.surmars.be

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