Critique | Musique

Critique musique : Kokoroko, tout vient à point à qui sait attendre

3,5 / 5
© NINAMANANDHAR
3,5 / 5

Album - Could We Be More

Artiste - Kokoroko

Genre - Jazz

Label - Brownswood Recordings/NEWS

Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Peu importe si la ponctualité est la politesse des rois. Il y a des disques qui, comme les gens, se font attendre. Et, qu’au final, on est tout content de voir arriver. Ainsi en va-t-il, par exemple, du premier album de Kokoroko. Elu meilleur groupe aux Urban Music Awards en 2020 et aux Parliamentary Jazz Awards en 2021, Kokoroko affolait déjà, en février 2019, le radar hebdomadaire qu’est la rubrique One to Watch du quotidien britannique The Guardian. A l’époque, l’ensemble emmené par la trompettiste Sheila Maurice-Grey comptabilisait 23 millions d’écoutes sur YouTube. La faute à son single Abusey Junction et à son apparition sur We Out Here, compilation consacrée par le label Brownswood de Gilles Peterson à la jeune scène jazz londonienne. Kokoroko y côtoyait Nubya Garcia, Ezra Collective et, forcément, l’incontournable tête de gondole Shabaka Hutchings (Sons of Kemet, The Comet is Coming, Shabaka and The Ancestors…). Sur le point de sortir son premier EP, la formation appelait déjà au calme et à la patience.

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Dans un monde d’urgence et de frénésie où l’industrie pousse les artistes à sortir des albums avant même qu’ils en aient les chansons, Kokoroko voulait apprendre, fourbir ses armes et travailler son groove. Kokoroko, à ne pas confondre avec Kokoko (collectif de musique électronique expérimentale basé à Kinshasa), est né au Kenya de grandes discussions sur la scène afrobeat. Particulièrement sur les soirées trop chiantes et blanches qui lui étaient alors consacrées à Londres. Maurice-Grey et Onome Edgeworth décidèrent pendant ce séjour de prendre le taureau par les cornes. De donner un coup de boost, d’offrir un nouveau souffle à la musique qu’ils aimaient tant.

© National

Les huit membres de Kokoroko viennent d’horizons différents mais ils partagent un amour sans bornes pour l’afrobeat et le highlife, la musique d’Ebo Taylor et celle de Pat Thomas. Ils défendent aussi surtout cette idée que le jazz est fait pour danser. Ce que beaucoup avaient fini par oublier. Kokoroko, c’est le jazz et l’afrobeat pour le XXIe siècle. Pas une modernisation électronique qui fait jeune, non. Mais bien une relecture à l’aune du grand métissage qui se distingue aussi bien dans ses instrumentaux (Tojo, Ewà Inú, Age of Ascent) que dans ses morceaux chantés, comme l’irrésistible, funky et très africain We Give Thanks, ou Those Good Times et sa néo-soul au féminin. D’aucuns trouveront ça gentillet. Certes, Could We Be More n’est pas un disque radical et survolté et Kokoroko (qui, en gros, signifie «sois fort» dans un dialecte nigérian) n’est pas le plus turbulent de la classe. Mais c’est l’un des plus curieux et des plus cosmopolites. Il se promène avec son jazz soul et cuivré en Amérique et en Angleterre. En Afrique de l’Ouest et aux Caraïbes. Bref, une classe bourlingueuse et décloisonnée.

Le 19/08 au Pukkelpop, Kiewit.

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