
[Critique ciné] Éternité, une expérience prenante et vibrante
De la fin du XIXe siècle à nos jours, la saga intime d’une famille, de couples et d’enfants, d’amour et de deuil…
Il serait facile, certains ne s’en priveront pas, de réduire le très beau film de Tran Anh Hung à un hymne à la famille traditionnelle et bourgeoise, mettant l’accent sur le rôle reproducteur de la femme. Et ce, d’autant plus que le roman adapté par le réalisateur franco-vietnamien, L’Élégance des veuves (1995), porte la signature d’Alice Ferney, écrivaine catholique et opposante à la loi sur le mariage homosexuel. Rien de militant n’est à chercher, pourtant, dans le film que nous offre celui qu’on découvrit avec L’Odeur de la papaye verte avant d’admirer Cyclo, À la verticale de l’été et Norwegian Wood (La Ballade de l’impossible). Styliste avant toute chose, et sculpteur sensuel du temps comme des corps et des sentiments, Tran Anh Hung fait d’Éternité une expérience visuelle, et aussi sonore, à la fois discrètement prenante et vibrant d’une subtile émotion. La circulation du passé, du présent et d’un avenir remis en jeu à chaque génération lui inspire un film proustien, fascinant, où passent des personnages de chair et pourtant fantomatiques dans leur si fragile rêve d’éternelle transmission (de la vie, d’un certain mode de vie). Un film crépusculaire, où s’exprime moins de nostalgie que de quête existentielle, entre loi de l’espèce et peur de perdre ce qui fait sens dans un monde vidé de certitudes.
DE TRAN ANH HUNG. AVEC AUDREY TAUTOU, BÉRÉNICE BEJO, MÉLANIE LAURENT. 1H55. SORTIE: 14/09. ***(*)
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