Comment la politique joue avec les codes du hip-hop

Barack Obama lâche son micro à la fin d'un discours © Capture d'écran

La politique et le hip-hop représentent deux mondes qui s’opposent en beaucoup de points et pourtant, petit à petit, les premiers tentent d’utiliser certains codes du second dans leurs techniques de séduction.

Depuis le début de la campagne française, certains candidats ont cru bon de s’emparer des codes du hip-hop au cours de leurs différents meetings, débats ou rencontres avec la population. Que ce soit au travers d’un dab lors de leur apparition dans une émission télévisée où ils étaient confrontés à des enfants ou en reprenant comme Emmanuel Macron, à tort, les paroles d’une des chansons du groupe marseillais IAM alors qu’il était de passage dans la cité phocéenne. Mais avant eux, toutes sortes de clashes s’étaient produits entre différents candidats. Celui qui représente le mieux le hip-hop en politique est sûrement l’ancien président américain Barack Obama qui n’a jamais hésité au moment d’affirmer ses gouts musicaux, allant de Mos Def à Erykah Badu en passant par Kendrick Lamar, ou en réalisant un mic drop à la fin de son discours lors du diner de l’Association des correspondants de la Maison-Blanche après avoir entre autres envoyé une pique à Donald Trump.

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Barack Obama est de tous les hommes politiques influents celui qui maitrise le mieux les codes du hip-hop et cela se vérifie dans ses gouts musicaux. Par le passé, il a notamment créé des playlists Spotify et dans celles-ci, on trouve des artistes tels que Mos Def, John Legend ou encore Andre 3000, le leader du groupe Outkast. Tout au long de son mandat, il a ouvert les portes de la Maison-Blanche à des musiciens comme Kendrick Lamar, J. Cole, Chance The Rapper ou encore Common et on l’a régulièrement vu aux côtés du couple Jay-Z/Beyoncé. Une stratégie qui aura valu le titre de président le plus cool de l’histoire des États-Unis tout en gardant une certaine crédibilité au sein du monde politique.

Pour d’autres, mélanger hip-hop et campagne politique n’est pas forcément gage de réussite. Lors des élections communales belges de 2012, l’actuel Premier ministre Charles Michel dévoilait un côté de sa personnalité qui était inconnu de tous et qui aurait peut-être dû le rester. En collaboration avec son conseiller communal Moon Nassiri, le candidat bourgmestre de Wavre s’essayait au rap dans une chanson à l’honneur de sa ville.

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Parmi les politiciens français, ils sont nombreux à avoir clamé leur amour pour ce genre musical, et ce quel que soit leur parti politique et leurs convictions. Marion Maréchal-Le Pen avait déclaré écouter Maitre Gims, Sexion d’Assaut ou encore Youssoupha, qui a d’ailleurs affirmé qu’elle est « peut-être réellement fan de rap » alors que le socialiste Benoit Hamon dit préférer le groupe NTM, allant jusqu’à tweeter leur morceau La Fièvre. Un comble pour la plupart des rappeurs qui se considèrent rarement comme les amis des politiciens.

La campagne pour les élections françaises de 2017 ne vient donc que confirmer une tendance qui s’observe depuis plusieurs décennies. Les candidats n’hésitant pas à s’affronter au moyen de punchlines acerbes dans le but de déstabiliser les autres concurrents et récolter les voix du public pour devenir le prochain président de la République. En regardant la montée de Jean-Luc Mélenchon dans les sondages réalisés après le débat du 20 mars, cette technique semble donc porter ses fruits. Celui du 4 avril pourrait bénéficier à Philippe Poutou qui, dans son style propre, s’est attaqué à François Fillon et Marine Le Pen.

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De l’amour à la haine, il n’y a qu’un pas

Comme expliqué, les codes des politiques et des représentants de la culture hip-hop se mélangent, mais leur histoire commune n’est pourtant pas faite que d’amour, les rappeurs faisant souvent allusion aux politiciens et autres forces de l’ordre de façon peu flatteuse.

En 1995, l’ancien ministre de l’Intérieur Jean-Louis Debré porte plainte contre le groupe Ministère A.M.E.R. qui sera alors condamné à payer 250.000 francs (plus de 40.000 euros) pour incitation au meurtre dans leur chanson Sacrifice de Poulet.

Plus récemment, l’actuel Premier ministre français Bernard Cazeneuve a par exemple porté plainte en septembre 2016 contre le rappeur Jo le Phéno après qu’il ait sorti le clip du morceau Bavure dans lequel il dit « sans hésiter faut les fumer » en parlant des policiers. Avant lui, Manuel Valls avait annoncé vouloir lutter contre les paroles de rap agressives envers la France, ses valeurs et ceux qui la représentent. Sous Nicolas Sarkozy, une ancienne secrétaire d’État avait demandé à ce que la chanson Sale Pute du rappeur Orelsan soit supprimée d’internet alors que le ministère de la Culture avait invité les maisons de disques à censurer les artistes. En 2005, le sénateur de la Moselle François Grosdidier s’allie contre le rap français avec 201 parlementaires. Au lendemain des émeutes qui ont secoué les banlieues parisiennes – les mêmes que Sarkozy voulait nettoyer au karcher – ils se sont associés pour porter plainte contre 7 groupes de rap dont Fabe, Lunatic, 113 ou encore Ministère A.M.E.R.

Pendant les élections présidentielles de 2007, on a pu voir Nicolas Sarkozy aux côtés du rappeur Doc Gynéco, qui a de nombreuses fois collaboré avec le Ministère A.M.E.R., pour tenter de se refaire une image auprès des habitants des cités. Pendant son quinquennat, il a souvent été appelé le président bling-bling, un terme plus fréquemment utilisé pour qualifier le style d’un rappeur que d’un homme politique.

La force de YouTube

Pour rajouter une couche un peu insolite au rapprochement entre les deux mondes, le youtubeur Khaled Freak partage régulièrement des vidéos dans lesquelles il remixe les déclarations de certains politiques pour en faire un tube rap. La star incontestée de sa chaine n’est autre que Jean-Luc Mélenchon qui réunit à lui seul plusieurs millions de vues. Des vidéos qui sont bien loin de déranger le candidat étant donné que le responsable de sa page YouTube a remercié le créateur en signant d’un MC Mélenchon. Ils voient là une manière de séduire les plus jeunes et ils vont donc les chercher là où ils sont, c’est-à-dire sur Internet et dans le milieu du hip-hop.

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Nul doute que d’ici le 7 mai et le deuxième tour des élections françaises, les candidats ne se priveront pas d’encore attaquer leurs opposants pour remporter la battle. Et s’ils semblent vouloir s’approprier les codes du milieu, la meilleure idée serait peut-être de s’inspirer de certains de ses textes.

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