Critique | Cinéma

[critique ciné] Last Night in Soho : long métrage ostentatoirement post-#MeToo

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Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Edgar Wright remonte le temps pour questionner son propre rapport fétichisé au passé.

Sympathique réalisateur de Shaun of the Dead, Hot Fuzz, Scott Pilgrim vs. the World ou encore Baby Driver, le Britannique Edgar Wright se réclame de l’influence déterminante de grands classiques de l’horreur psychologique à l’anglaise comme le Repulsionde Roman Polanski (1965) et surtout le vénéneux Don’t Look Now de Nicolas Roeg (1973) au moment de faire atterrir son nouveau long métrage sur les écrans. Situant son action de nos jours, à Londres, Last Night in Soho met en scène la descente aux enfers d’une jeune provinciale, Eloise (Thomasin McKenzie), passionnée de mode et de design qui peine à se faire aux moeurs de la capitale. Très vite, cette dernière, isolée, mal à l’aise, se trouve une espèce d’échappatoire mentale lui permettant de se catapulter mystérieusement dans les années 60, en plein Swinging London, où elle rencontre son idole, Sandie (Anya Taylor-Joy, délaissant les échecs pour la danse), une éblouissante étoile montante. Mais ce cadre fantasmé recèle aussi son lot de sombres secrets, et le rêve vire bientôt au cauchemar pour Eloise, prisonnière de couloirs du temps qui la plongent dans un labyrinthe de malheurs…

[critique ciné] Last Night in Soho : long métrage ostentatoirement post-#MeToo

De l’autre côté du miroir

En formaliste assez prévisible et clinquant, Wright multiplie visuellement les dédoublements, les jeux de miroir et autres effets spéculaires plutôt convenus afin de figurer les liens qui unissent Sandie dans le passé à Eloise au présent. On pense beaucoup au cinéma de Dario Argento, aussi, face à Last Night in Soho, mais rien ici n’est suffisamment convaincant ou élaboré pour le hisser au niveau de ses modèles avoués. Adepte d’une stylisation un peu creuse et, en tout cas, d’une virtuosité très amidonnée, Edgar Wright a ceci dit le bon goût de questionner son propre rapport fétichisé au passé. Comme sa jeune héroïne, il est nostalgique d’une époque qu’il n’a pas connue. Et son film, avec ses allures de juke-box permanent (le Downtown de Petula Clark ad nauseam), acte en un sens le fait qu’elle lui sera à jamais inatteignable.

Long métrage ostentatoirement post-#MeToo (machisme et violence du patriarcat triomphant à tous les étages), Last Night in Soho parle de la difficulté à se sentir à sa place – et de son temps. Mais à force de tirer toujours sur les mêmes ficelles, son propos se fait vite très redondant. Dans son dernier acte, le film cède même au piège du twist facile et de l’outrance aux accents anesthésiants de grand-guignol nawak. On le sait, le prochain projet d’Edgar Wright consistera en une nouvelle adaptation du dystopique Running Man de Stephen King (1982), qui sera également un remake du fameux film du même nom avec Schwarzy (1987). S’il n’en a pas fini de regarder dans le rétroviseur pour mieux réfléchir à l’avenir, gageons que les années 80 seront davantage dans ses cordes…

Last Night in Soho

D’Edgar Wright. Avec Thomasin McKenzie, Anya Taylor-Joy, Matt Smith. 1 h 56. Sortie: 27/10. **(*)

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