Myriam Leroy
Myriam Leroy Journaliste, chroniqueuse, écrivain

Les séries télé ressassent toujours les mêmes thèmes. Focus vous les dévoile tout au long de l’été. Troisième étape: le sexe. Un fondamental.

Il paraît que l’équation est infaillible. Qu’avant chaque crise économique, l’ourlet des jupes des filles rallonge – c’est un éminent prof d’économie américain qui l’a décrété à la fin des années 20. Les gambettes s’étaient rhabillées à la veille du krach boursier de 29, peu avant le choc pétrolier de 1973, aux portes de 1987à Les mois derniers n’auraient pas fait exception, d’après les trendwatchers. Comme les cafédomanciennes s’essaient à la lecture de l’avenir dans le marc des petits noirs, les optimistes prédisent une conjoncture boursière favorable en analysant les dernières tendances de la mode: retour au court, à l’étriqué. Plus d’argent, plus de chair. Moins de tissu, plus de sexe. Imparable.

La télé américaine n’a pas exactement suivi l’adageà Elle inonde les écrans de séries qui ont la bagatelle comme thème principal depuis la rentrée 2007 (année de naissance de Gossip Girl, Californication, Tell me you love me…), même si elle n’a, il est vrai, jamais été aussi branchée fesses qu’aujourd’hui. En témoigne le dernier rejeton d’HBO (chaîne cablée diablement trendsetteuse), Hung, qui ne fait guère mystère de ses intentions: son titre signifiant – à peu de choses près – « gros pénis ». C’est l’histoire d’un gars largué de toutes parts qui, confronté à des fins de mois difficiles, décide d’utiliser sa plus grande qualité (son « outil gagnant », comme l’appelle son prof de « confiance en soi ») – à savoir, la taille de ses attributs – pour se faire de l’argent. Le héros devient donc gigolo, « produit » par une amie qui a déjà pu tâter la marchandise. Mise sur orbite le 28 juin, la série a rassemblé un public record, 2,8 millions de téléspectateurs, ce qui fait de son pilote le meilleur rabatteur d’HBO depuis deux ans et celui de John from Cincinnati (un OVNI sur le surf qui a rapidement déçu).

Cachez ce sein…

Voilà la réponse de la chaîne à l’excellent Californication, succès public et critique de sa rivale Showtime – à découvrir bientôt à la RTBF -, où un écrivain oisif voit sa vie affective et professionnelle se défaire au rythme de ses coups de rein. Showtime qui a, comme HBO, compris avant les autres l’incroyable attrait de la luxure sur petit écran, particulièrement quand la morosité ambiante pèse comme une chape de béton sur la libido du téléspectateur . Journal intime d’une call-girl, c’est aussi Showtime qui la diffuse aux States (et la chaîne britannique ITV2 qui la produit). On y voit une jeune femme peu farouche (Billie Piper) monnayer ses charmes pour mener la grande vie. Pas complexée pour un sou, la prostituée, dont la taille de l’appartement londonien et du dressing de fringues de créateurs compensent largement les quelques désagrément vécus sur le lieu de travail – le matelas. Lucratif et récréatif, le sexe, pour elle.

Moins drôle est celui, malade, autour duquel s’articule Tell me you love me (série annulée par HBO avant sa deuxième saison), dans laquelle trois couples consultent une thérapeute. Problèmes de désir, vaine envie d’enfantà Ultra réaliste, le feuilleton est l’un des seuls à montrer ce dont il parle, diffusant dans son sillage une odeur de souffre qui n’a pas plu à tout le monde. D’autant que les « choses » sont filmées sans fards: poils, cellulite (à) tout – ou presque – y est comme dans la vraie vie. De quoi précipiter sa chute: le public américain n’est pas particulièrement friand d’étreintes filmées – du moins sur les grands réseaux, à heure de supposée forte audience. Il suffit de se souvenir du raffut (baptisé Nipplegate) qu’avait fait le téton métallique de Janet Jackson apparu en intermède du Superbowl sur CBS en 2004 pour le comprendre: il vaut mieux garder ses braguettes soigneusement zippées, et ses seins hermétiquement sanglés dans leurs balconnets. Le cul ne plaît jamais tant que lorsqu’il est décortiqué, glosé, analysé, pris et retourné par voieà orale.

Myriam Leroy

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