Après les promesses pour la diversité aux Oscars, qu’est-ce qui va changer?

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FocusVif.be Rédaction en ligne

Frances McDormand a créé le temps fort des Oscars dimanche en demandant à toutes les femmes nommées de se lever, enjoignant les ténors d’Hollywood: « Nous avons des histoires à raconter qui ont besoin de financement ». Et évoquant comme solution possible les « clauses d’inclusion », des termes que les stars peuvent inclure dans leur contrat pour exiger des équipes plus diverses.

La saison des prix hollywoodiens a été riche en dénonciations et promesses d’action pour lutter contre les violences sexuelles et les discriminations à Hollywood, dans la foulée de l’affaire Weinstein et du mouvement #MeToo.

Mais le palmarès des Oscars laisse songeur: hors prix d’interprétation, il y avait 47 femmes finalistes pour 150 hommes. Et quatre lauréates contre 32. En termes de diversité ethnique, le palmarès est un peu meilleur que ces dernières années grâce à des années de campagne « OscarsSoWhite (les Oscars si blancs), mais pas encore représentatifs de la population.

La vénérable Académie des Oscars, constituée à majorité d’hommes âgés et blancs, a promis de doubler le nombre de femmes et de représentants des minorités ethniques parmi ses membres d’ici 2020. Mais malgré 1.500 nouveaux artistes invités, la part de femmes n’est passée que de 25 à 28% en trois ans, et celle de minorités ethniques de 8 à 13%.

Sur l’ensemble du secteur, c’est même la stagnation: malgré les promesses et les discours, « les chiffres ne reflètent pas encore d’évolution notable. En 2017, les femmes représentaient 11% des réalisateurs travaillant sur les 250 plus gros films de l’année. Comme en 2000 », constate Martha Lauzen, directrice du centre d’étude sur les femmes au cinéma et à la télévision de l’université de San Diego.

Une étude de l’université USC Annenberg ne trouve que 4% de femmes réalisatrices en moyenne sur les gros films des dix dernières années, concluant: « le fauteuil de metteur en scène reste occupé par des hommes blancs ». Quand à la présence des femmes à l’écran: elle stagne aussi à environ 30% des rôles parlants.

La clause d’inclusion évoquée par Frances McDormand peut-elle changer les choses? Ce concept a été imaginé comme une possible solution par Stacy Smith, directrice du programme d’études sur l’inclusion à l’université USC Annenberg.

Bouder les salles

Pour Martha Lauzen, cela dépend de combien d’acteurs, réalisateurs et autres ont le pouvoir de faire ces demandes, à l’instar de poids lourds d’Hollywood comme Meryl Streep et Jennifer Lawrence, et de « combien l’exerceraient? ». La diversité est d’après elle un « problème sectoriel qui demande » (…) des objectifs d’embauche sectoriels ». Autrement dit, des quotas.

Stacy Smith propose d’autres mesures: « Ajoutez-en cinq » – ajouter seulement cinq rôles parlant de femmes par film, même des tous petits rôles, pourrait aider à parvenir à la parité en quelques années seulement. Autre idée: l’obligation de rencontrer au moins un candidat(e) provenant d’un groupe sous-représenté pour chaque emploi à pourvoir. Et aussi: demander au public de prendre ses responsabilités en boudant les films qui ne reflètent pas la démographie réelle.

Le carton de « Wonder Woman », réalisé par une femme sur une super-héroïne, et de « Black Panther », superhéros noir joué et réalisé par des Noirs, pourrait faire plus pour changer la donne et les pratiques des studios de cinéma que tous les discours. Ces succès « montrent qu’il y a plus d’ouverture d’esprit à l’idée de travailler différemment dans les studios. Il y a des chances de voir les choses changer dans les mois à venir » à Hollywood, juge Katherine Pieper, d’USC Annenberg. Pour Martha Lauzen, la clé pour faire diminuer la culture de sexisme, c’est d’embaucher plus de femmes à des postes de décision les studios.

Certaines femmes ont choisi de prendre les choses en main sans attendre, à l’instar de l’actrice Reese Witherspoon. A l’approche de la quarantaine, voyant les rôles se raréfier, elle a fondé sa maison de production et commencé à acheter les droits de best-sellers avec de beaux rôles de femmes. Depuis: une série de hits au box-office: « Gone Girl », « Big Little Lies », « Un raccourci dans le temps », « Wild »… Avec Ava DuVernay, réalisatrice noire de la méga-production de Disney « Un raccourci dans le temps », ou encore Oprah Winfrey, elle fait dorénavant partie des nouveaux « power brokers » d’Hollywood.

Mais elles sont encore peu nombreuses et toutes ne font pas forcément travailler des femmes, à l’instar de Kathleen Kennedy, productrice qui règne sur l’empire « Star Wars », et n’a embauché que des hommes blancs pour la mise en scène.

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