Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Sur le pied de guerre. Le groupe de l’acteur Jared Leto s’est mis en ordre de marche. Gros rock qui tache, élans épiques, pose tourmentée: carton assuré?

« This Is War »

Distribué par EMI.

Il aura beau faire, un acteur ne sera jamais un chanteur comme les autres. C’est aussi injuste que paradoxal: l’acteur passe son temps à se glisser dans la peau de différents personnages, mais on lui refuse celui de musicien. Question de statut certainement. Le comédien est par définition un menteur, un imposteur. Or, même quand le menteur dit la vérité, on ne le croit pas. Peu importe la performance, le comédien sera donc toujours un « acteur qui joue au chanteur ». Ce qui ne veut pas dire qu’il ne peut pas sortir des bons disques. Mais c’est souvent en assumant ce statut inconfortable que l’essai est le plus réussi. C’est la belle Scarlett Johansson qui enfile le costume, ou tout du moins, les chansons de la bête Tom Waits; c’est Charlotte Gainsbourg qui suit à la lettre la mise en scène du réalisateur Beck.

Et Jared Leto? Depuis près de 10 ans, la star ( Requiem For A Dream, Fight Club, mais aussi le Mr Nobody de Jaco Van Dormael) affiche de claires ambitions musicales. Tendance cuir et guitare, rebelle et tourmenté. Il paraît qu’il annule même les concerts de son groupe 30 Seconds To Mars si l’organisateur a mis le nom de la star trop en avant dans la promotion de l’événement. Du sérieux donc. Avec pas mal de succès: le précédent album, A Beautiful Lie, s’est vendu à plus de 3 millions d’exemplaires. Honnêtement, on ne s’en était pas encore rendu vraiment compte. Il faut dire que jusqu’ici le groupe – dans lequel joue également Sharon Leto, frère du premier – a surtout cartonné chez lui, aux Etats-Unis. La donne pourrait cependant changer. Le groupe semble en effet décidé à faire le forcing. Autant donc être prévenu: le matraquage risque d’être intensif ces prochaines semaines. En Belgique, 30 Seconds To Mars passera ainsi par Forest National.

Foule sentimentale

De toutes manières, Leto ne peut pas se contenter de moins. This Is War, 3e album du groupe, fait en effet dans l’épique, le martial, le conquérant. Dès le départ, le ton est donné. Après une intro tout en claviers et cordes parano, ça martèle et ça crâne. Il y a une bonne idée dans le disque: celle d’avoir réuni un millier de groupies et leur avoir fait enregistrer une partie des ch£urs. A chaque intervention de la foule, l’effet est maximum – sauf quand elle se contente de jouer l’assistance fanatique ( 100 Suns), là Jared Leto redevient la star adulée par un public de midinettes plutôt que le leader d’une armée rebelle. Un poil démago, la démarche est même prolongée via la pochette, déclinée à partir des 2000 photos de fans.

Pour le reste, la charge est massive, pas franchement finaude. Voix éraillée, Jared Leto joue la menace, prend la pose guerrière, mais oublie de pondre des chansons convaincantes. This is not a game, prévient-il dès l’entame. Et de continuer: I don’t believe in fate. Et puis, la suite? Open your heart? Gagné! Clairement, le groupe joue la corde gothico-romantique vaguement mégalo. Une sorte de croisement très américain entre les Killers, My Chemical Romance et Limp Bizkit. Les amateurs apprécieront. Les autres? Trente secondes suffiront en effet…

En concert le 1/03, à Forest National, Bruxelles.

Laurent Hoebrechts

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