Marianne Faithfull, Foxcatcher, The Americans… 9 choses à ne pas manquer à la télé cette semaine

Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Films, séries, documentaires, émissions… Notre programme télé pour la semaine du 24 février au 2 mars.

JEAN-MICHEL BASQUIAT, LA RAGE CRÉATIVE

Documentaire de David Shulman. ****

Dimanche 25/2, 17h35, Arte.

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Il a vendu son premier tableau à Debbie Harry de Blondie pour 200 dollars et fut le premier artiste noir (c’était en 1985) à faire la couverture du New York Times. Fils d’un émigré haïtien et d’une Portoricaine, Jean-Michel Basquiat est de ceux qui ont fait entrer le graff et la culture de la rue dans les musées. L’an dernier, l’une de ses oeuvres se vendait d’ailleurs aux enchères pour un montant faramineux de 110,5 millions de dollars… Un comble pour cet homme qui s’irritait jadis de voir son art considéré comme de la marchandise. Parti trop tôt (il est mort à 27 ans d’une overdose), Basquiat n’en a pas moins connu le succès de son vivant. Les collectionneurs achetaient ses oeuvres avant même qu’elles soient terminées… Le documentaire de David Shulman raconte le gamin malicieux qui a pris New York d’assaut, taguait les murs de la ville sous le pseudonyme de SAMO et, caviar et cocaïne, finit par devenir l’un des protégés d’Andy Warhol. « Ils me voient comme un sauvage. Mi-homme, mi-singe » , disait-il. Pour le connaître, il faut se tourner vers ses oeuvres, affirme sa soeur. Son copain d’école l’artiste Al Diaz, Fab 5 Freddy, Stan Peskett, Brett De Palma, le biographe de Warhol ou encore James Chance, qui fait des impros de sax à divers endroits de Big Apple, participent à ce vibrant et intelligent portrait. « Moi, je ne sais pas dire ce que je fais, insistait-il . C’est comme demander à Miles Davis de décrire le son de sa trompette. » J.B.

MALI BLUES

Documentaire de Lutz Gregor. ***(*)

Dimanche 25/2, 23h20, Arte.

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En janvier 2012, au Mali, des milices islamistes, profitant de la rébellion touareg, imposaient la charia et interdisaient la musique. Impensable pour un pays aussi dansant et chantant que celui d’Amadou et Mariam et de Tinariwen. À travers le portrait et les pensées de quelques artistes du cru, leur courage et leur étrange destin, Lutz Gregor raconte une Afrique bouillonnante, bienveillante, ouverte et plurielle. Fatoumata Diawara a fui son pays à 17 ans pour échapper à un mariage arrangé et n’y a jamais donné le moindre concert. Aujourd’hui, elle a accepté, pardonné, a acheté un terrain et fait construire. Elle chante même sur ses terres devant des femmes locales contre l’excision dont elle a été victime. Venu d’une célèbre famille de griots, ces musiciens conteurs, gardiens de la tradition, Bassekou Kouyate vit avec les siens dans un quartier pauvre de Bamako, par solidarité avec le peuple. Bamako, le musicien touareg Ahmed Ag Kaedi s’y est réfugié sans sa famille lorsque, au nord, les extrémistes ont bousillé ses instruments et ont menacé de lui couper les doigts. Lutz Gregor croise aussi la route de Master Soumy, musulman pratiquant qui questionne son islam en rappant et condamne les atrocités commises au nom de sa religion. Des images splendides aux couleurs incroyables, particulièrement de nuit, et des rencontres pas comme les autres pour crier que  » la bouche est plus forte que les armes« … J.B.

CREED, L’HÉRITAGE DE ROCKY BALBOA

Film de boxe de Ryan Coogler. Avec Michael B. Jordan, Sylvester Stallone, Tessa Thompson. 2015. ****

Lundi 26/2, 20h30, La Une.

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À l’heure où son épatant Black Panther brille au grand écran, il est bon de revoir le film précédent (son deuxième) du jeune et très doué Ryan Coogler. Celui qu’avait révélé Fruitvale Station, chronique des dernières 24 heures d’un jeune afro-américain victime d’une bavure policière, ranime la franchise Rocky en prenant pour personnage central… le fils d’Apollo Creed. Ce jeune homme rebelle et turbulent ignore que sa mère est la veuve du grand champion mort sur le ring, adversaire puis ami de Rocky Balboa. Quand il l’apprendra, il voudra entamer une carrière dans la boxe… en prenant Rocky comme entraîneur. Un Stallone buriné fait face au jeune Michael B. Jordan (The Wire) dans des scènes intimistes pleines d’émotion. Et les images de combat sont très percutantes. Les fans de la saga seront comblés, ceux qui la découvrent à cette occasion voudront en voir plus. L.D.

FOXCATCHER

Biopic de Bennett Miller. Avec Channing Tatum, Steve Carell, Mark Ruffalo. 2014. ****

Mardi 27/2, 23h40, La Deux.

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C’est une histoire de fous, et pourtant elle est vraie. Dans les années 80, un certain John Eleuthère du Pont, philanthrope et richissime, créa sa propre équipe de lutteurs pour les préparer aux compétitions les plus importantes en les isolant de tout souci matériel. Mark Schultz, médaillé olympique, fut sa recrue de choix. Mais dans le huis clos de son camp d’entraînement situé en Pennsylvanie, du Pont faisait régner une ambiance très particulière. Et le récit sportif allait s’achever dans la rubrique fait-divers… Avec un Steve Carell surprenant en milliardaire excentrique et un Channing Tatum à la fois fort et vulnérable en champion, Foxcatcher nous entraîne dans une chronique à la fois drôle et troublante, fascinante et même terrifiante par endroits. Un des films américains les plus singuliers de ces dernières années. L.D.

BAD BANKS

Série de Christian Schwochow et Olivier Kienle. Avec Paula Beer, Désirée Nosbuch, Barry Atsma, Jean-Marc Barr. ***(*)

Jeudi 1/3, 20h55, Arte.

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Offrir à la crise financière un ancrage local entre Bruxelles, Luxembourg et Francfort pour en démonter les ressorts intimes et égotiques, voilà l’excellente idée de Bad Banks. C’est dans le confort grand-ducal que Jana Liekam (Paula Beer) vit avec son compagnon. Jeune banquière prometteuse du Crédit International, elle assiste le lunatique fils du patron. Licenciée pour s’être montrée plus compétente que lui, terrorisée à l’idée de perdre sa sécurité financière, elle est sauvée par Christelle Leblanc, sa mystérieuse supérieure hiérarchique, qui lui obtient un entretien dans une prestigieuse banque d’investissement de Francfort, où sévit l’implacable et remuant Gabriel Fenger, sorte de Loup de Wall Street façon Wurst & Schnitzel. Couvée par sa bienfaitrice aux obscurs desseins, Jana va mettre au point un produit structuré particulièrement retors, spéculant sur les grandes catastrophes, et sera projetée au coeur d’un scandale financier qui va emporter politiques, emplois et économies dans le même mouvement. En mode thriller, Bad Banks dépeint un monde de la finance en quête du prochain shoot, comme un vulgaire junkie. Mais en multipliant les intrigues, il laisse apparaître de grosses ficelles caricaturales et délaisse un peu vite ses qualités pédagogiques premières. N.B.

BORN IN SYRIA

Documentaire de Hernán Zin. ***(*)

Jeudi 1/3, 22h30, La Une.

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Il y a des documentaires qui, visionnés tranquillement installé dans un fauteuil, une tasse de café bien chaud à la main, sont inconfortables à commenter avec le recul nécessaire. À l’aune de leur tragique contenu, certes, mais aussi du fait de l’empathie universelle d’être parent. Car si l’épineuse problématique des migrants a été scrutée sous tous les angles, la caméra de Hernán Zin ondoie à une hauteur inédite. Pas plus haute que trois pommes. C’est plongée dans le regard de sept enfants, transbahutés bon gré mal gré entre terre et mer, qu’elle nous impose sa terrassante réalité. Durant une année, le réalisateur a partagé leurs parcours, de leur patrie en lambeaux à leur pays d' »accueil ». De la douleur au dépassement, du désespoir à l’optimisme, tant d’innocence perdue sur le chemin parcouru. Cette chronique déjà primée, aussi traumatisante que d’une nécessité absolue, s’ouvre sur le sauvetage d’un canot mal embarqué avant d’imperceptiblement mettre le cap sur une autre forme de rédemption. Celle des âmes. M.U.

43E CÉRÉMONIE DES CÉSAR

Événement présenté par Manu Payet.

Vendredi 2/3, 21h00, Be 1.

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C’est un événement en soi… Pour la première fois de son Histoire, l’Académie des arts et techniques du cinéma décernera cette année un César du public. Pas un film pour lequel auront voté les spectateurs mais celui ayant réalisé le plus d’entrées en salles en 2017 et durant les deux premiers mois de 2018. Objectif avoué? Récompenser le cinéma comique, genre le plus populaire du pays, comme en atteste au moment d’écrire ces lignes la première place du Raid dingue de Dany Boon. Ce nouveau prix en dit long sur le rapport compliqué entretenu par les César avec la comédie et l’humour. D’autant que l’acteur et réalisateur nordiste n’a jamais reçu jusqu’ici la moindre statuette. Pour cette 43e Cérémonie présentée par Manu Payet (photo) et dédiée à Jeanne Moreau, Au revoir là-haut et 120 battements par minute font figure de grands favoris, comptant tous deux treize nominations. Tandis que Noces de Stephan Streker sera en lice pour le César du meilleur film étranger. Ave César. J.B.

THE AMERICANS SAISON 1

Série créée par Joe Weisberg. Avec Keri Russell, Matthew Rhys, Noah Emmerich, Maximiliano Hernández, Holly Taylor, Keidrich Sellati. ****

Vendredi 2/3, 21h50, Club RTL.

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Séance de rattrapage vivement conseillée! La première diffusion sur une chaîne non payante de cette série de grande qualité mérite qu’on y revienne quelques instants. L’époque: les années 80. Le contexte: la guerre froide est entrée dans une phase cruciale en 1981, entre une administration Reagan décidée à remporter la victoire au finish et une Union soviétique aux abois, qui sent ses coutures craquer de partout. Au pays de l’Oncle Sam, un couple d’espions du KGB infiltrés dans l’American way of life de la banlieue de Washington avec ses enfants -qui ignorent tout de la véritable identité de leurs parents- s’affaire à mettre des bâtons dans les roues du contre-espionnage local. Philip et Elizabeth Jennings ont été conditionnés jusqu’aux ongles pour mener à bien leur mission: fausses biographies, faux métiers, faux souvenirs, tout est méthodiquement digéré et interprété par le couple, qui se fond dans un quotidien banal abhorré. Jouant sur ce contraste tout en reconstituant l’époque, sans tomber dans le pastiche ni le revival, cette série créée en 2013 par Joe Weisberg (un ancien de la CIA) est un thriller sans concession, ni sur la mécanique narrative, efficace, ni sur les dessous de l’espionnage, crédibles, ni sur l’humour, l’action et le suspense, omniprésents et admirablement rythmés. N.B.

MARIANNE FAITHFULL, FLEUR D’ÂME

Documentaire de Sandrine Bonnaire. ***(*)

Vendredi 2/3, 23h15, Arte.

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C’est l’histoire improbable d’une jolie fille de 17 ans mal fringuée et fraîchement sortie d’un pensionnat catholique, repérée à une soirée par Andrew Loog Oldham, le manager des Rolling Stones. Celle d’une gamine, fille d’espions britanniques, née à Londres au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et devenue l’une des égéries des sixties…  » Quand je travaille avec elle, je me rends compte à quel point c’est un condensé de l’Histoire du rock qui m’a accompagné ces 50 dernières années » , dit d’elle le batteur et producteur Rob Ellis. L’inusable Marianne Faithfull, 71 printemps, est aussi une survivante. Une miraculée de la vie. Une rescapée de l’excès.

Après s’être intéressée de près à Jacques Higelin qu’elle connaissait bien (elle a même chanté sur un de ses disques) à travers le documentaire Ce que le temps a donné à l’homme, l’actrice Sandrine Bonnaire se penche cette fois sur un mythe décadent des années 60 et du Swinging London. Son addiction aux drogues, Le Festin nu de Burroughs qu’elle a lu et dont elle a fait un projet de vie, ses années dans la rue, fauchée et se shootant à l’héroïne, la célèbre descente de flics chez Keith Richards, la mise à l’écart et la mort de Brian Jones, sa relation avec Mick Jagger, pour lequel elle dit avoir tout abandonné, jusqu’à son intelligence et sa vision du monde… Faithfull se confie. Et évoque même des choses dont elle n’a pas envie de parler. L’autodestruction, la désintoxication.

L’un ou l’autre, comme Ed Harcourt, vient apporter son petit grain de sel. Mais Fleur d’âme, entre les images d’archives, les extraits de films d’hier et de concerts d’aujourd’hui, c’est avant tout Faithfull par Faithfull devant l’objectif de Bonnaire. Un docu dans les volutes de cigarettes. Sans génie esthétique particulier, mais avec les faveurs de l’intime. Un film au sujet de l’artiste plus que de son oeuvre. « Je me suis dit: ce sera mon dernier disque, commente-t-elle au sujet de Broken English. Après, je mourrai. Mais avant de mourir, je dois montrer qui je suis et ce que j’ai dans le ventre. Je ne suis ni une victime ni une gamine écervelée. Je suis Marianne Faithfull et voilà ce que je vaux… » C’était il y a 39 ans. J.B.

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