Critique

Life in a Day

Tour de force que celui de Kevin MacDonald qui, sur une idée de Ridley Scott, parvient à tisser une véritable vie à partir d’existences multiples.

LIFE IN A DAY, DOCUMENTAIRE DE KEVIN MACDONALD. ****

Ce mardi 13 décembre à 20h50 sur Be 1.

Le 24 juillet 2010, Ridley Scott sollicitait les internautes pour une entreprise qui pouvait alors être considérée comme un gadget. Il demandait à chacun de filmer sa vie ce jour-là, avec une caméra, un téléphone, un iPod…, de répondre à quelques questions simples, et de lui envoyer via YouTube sa matière brute. Le réalisateur d’Alien et Gladiator a ainsi récolté quelque 80 000 vidéos (soit 4500 heures de rushes issus de 192 pays) et a confié la réalisation d’un film à partir de ces images à Kevin MacDonald (Le dernier roi d’Ecosse, Jeux de pouvoir…). Qui a ramené cette gigantesque banque de données à 92 minutes dans lesquelles, il est vrai, toute la vie se déploie en technicolor. Dans des plans hésitants captés avec la lentille de l’iPhone, comme dans des saynètes magnifiques filmées en full HD.

Elles débutent avec la lune qui se couche, les éléphants qui se baignent, les enfants qui tètent, les fêtards qui se saoulent. « This is the best day of my life », dit l’un d’eux. Le film se clot sur la lune qui se lève et les confessions d’une jeune fille « normale », « pas assez intéressante », qui a espéré toute la journée qu’il lui « arrive quelque chose ». Entre les deux, l’amour, la mort, la maladie, la joie, la peine, la religion, les préjugés, la pauvreté et l’opulence.

Métaphysique

Life in a Day est certes dégoulinant de moralisme et de bons sentiments (notamment en alternant des séquences contrastées pauvreté du sud/opulence du nord). Mais il ne s’épargne aucune réalité: une vache à l’abattoir s’y vide de son sang, tandis qu’une mère récemment opérée de tout le corps ou presque suinte de partout, un jeune homme avoue son homosexualité à sa grand-mère et un autre cite, parmi ses plus grandes peurs, l’homosexualité (« a disease »). D’un intimité folle et parfois gênante, ce documentaire historique donne le tournis, le vertige, des frissons. La télé de la réalité fait autant peur que rire.

Et même si cette heure trente de patchwork qui ne s’embarrasse d’aucun fil rouge peut sembler un peu longue pour son format clipesque, on ne peut la lâcher des yeux tant il s’y joue, dans l’anodin du quotidien, quelque chose qui confine au métaphysique. Un fascinant ballet de tranches de vie, à voir aussi sur YouTube.

Myriam Leroy

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