Critique

L’album de la semaine: The Delta Saints – Bones

Delta Saints © DR
Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

BLUES-ROCK | Deuxième album d’un collectif de Nashville qui sonne divinement bien dans les eaux généralement usées du blues et du swamp-rock. Quelqu’un a dit Led Zep?

C’est quoi, ce vagissement de premières notes de guitare toutes marécageuses? Cette sudation d’électricité comprimée? Ce groove lent qui donne une autre définition de l’idéal funky? La question est à peine ouverte que la voix arrive. « My head is aching/Tell it can you tell me/Speak a little bit louder »: on a trouvé le petit frère jumeau de Robert Plant. Même puissance au-delà du tonique, même crinière vers le haut et même sens, à quatre décennies et demie d’écart, du blues revisité par l’acidité versatile du rock. The Delta Saints passent dix chansons à élaborer une certaine idée de la tension -en cela, ils évoquent aussi Led Zeppelin: la rythmique qui tabasse, le clavinet à la Physical Graffiti dans Heavy Hammer et, toujours dans celui-là, le glissement à la Page des doigts vengeurs sur le manche. La guitare des Delta Saints, c’est d’ailleurs leur bonus trauma, un passeport vers le Valhalla: crasseuse et sacrée, décemment acrobatique (Dust). Référence aux fameux Anglais donc, même si ces titres à la fois sensuels et gluants ont un quota d’Amérique supplémentaire au compteur -pas si bizarre pour un groupe formé au Tennessee en 2007.

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Lorsque The Delta Saints définissent eux-mêmes leur mishmash, ils en parlent comme étant du « bayou rock imprégné de bourbon ». Pour ceux qui ont raté les cours de géo, le bayou rock est un idiome généralement appliqué aux vibrations humides d’artistes tels que J.J. Cale, Little Feat, Canned Heat et bien sûr Creedence Clearwater Revival. Ces derniers qui baptisèrent l’un de leurs albums, Bayou Country, du nom des boyaux aquatiques qui forment le bassin du Mississippi en Louisiane. C’est sans doute trop évident à écrire, mais ce disque ramène vraiment au thermomètre de True Detective, à ce que l’on sent en visitant la région: un horizon dominé par les eaux, un poison de chaleur et une forme de menace sourde, météo ou humaine, dont on ne sait trop à quel moment elle vous pétera à la gueule. Sur leur deuxième album studio, les musiciens de Delta Saints subliment leurs influences dopantes -on peut aussi y rajouter les Black Crowes prime époque- via des morceaux totalement affranchis. Sans limite de l’espace utilisé qui incendie la carcasse du blues (Soft Spoken), sans aucune barrière instrumentale. Dans Butte la rose, le chanteur Ben Ringel entame l’affaire en susurrant sa confession –« Singing Hallelujah preacher »– avant d’appuyer un crescendo qui finit dans des bacchanales de guitares rageuses et de synthés orgasmiques. Putain de chanson, et ce n’est même pas la seule.

Distribué par V2 Records.

EN CONCERT LE 09/10 AU SPIRIT OF 66 À VERVIERS.

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