Cordon/Containment: quand la RTBF préfère l’adaptation US à l’originale flamande

En haut: Containment, en bas: Cordon © The CW/VTM
Nicolas Bogaerts Journaliste

Saluée hors de nos frontières, la série flamande Cordon est diffusée chez nous dans son adaptation US sous le titre Containment.

Au moment de sa diffusion originale sur VTM au printemps 2014, Cordon a généré une onde de choc bien au-delà de nos frontières. Achetée pour diffusion en Australie et en Angleterre (via BBC4), elle a très rapidement été adaptée, en 2015, puis diffusée en 2016 par la chaîne de télévision américaine The CW, sous le titre Containment. C’est cette version que La Une diffuse ce dimanche. Une histoire bien belge?

L’enfer c’est les autres

Le Cordon original a été écrit par Carl Joos. Scénariste de De zaak Alzheimer, Alabama Monroe et Le Traitement (De Behandeling), le type est une épée. Sa géniale chronique d’Anvers en proie à la propagation rapide et effrayante d’un virus type grippe aviaire customisé, que tout le monde croit d’origine terroriste, pointait tout un tas de préoccupations contemporaines. Ainsi de la réaction des autorités qui imposent un cordon de sécurité autour du foyer de propagation du virus, fait de containers entassés en murs qui bloquent les rues, transformant la zone à risque en un ghetto où les individus meurent à petit feu. Puis, les problèmes qui se posent aux forces de police, chargées de maintenir l’ordre et de protéger la population… des victimes mêmes de la contagion, transformées en créatures mourantes et dépourvues des droits civiques les plus élémentaires. Enfin, l’attitude de la population de part et d’autre du mur de tôle ondulée. Quels liens allaient se diluer, se transformer, se renforcer? Et ce virus d’origine criminelle, qui en était l’auteur? Le tout était filmé de manière réaliste, épaulé par un casting au petit poil (Veerle Baetens, Wouter Hendrickx…), créant un univers singulier qui n’a rien à envier aux productions anglo-saxonnes. Résultat, la série de VTM est parvenue à séduire en moyenne 855.000 spectateurs (direct et VOD compris) et 42,8% de la tranche 18-54 ans. Un score qui n’est pas pour rien dans son succès à l’étranger.

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Tot ziens Antwerp! Hello Atlanta, ville d’accueil de Containment, produite par The CW. Et coucou Julie Plec, créatrice de The Vampire Diaries, bombardée showrunner. Derrière la caméra, on retrouve le vétéran David Nutter (The West Wing, Smallville, Band of Brothers, Sopranos, Game of Thrones) qui a une réputation de porte-bonheur pour les séries dont il réalise le pilote. Au casting, Julie Plec a rameuté une partie des acteurs de Vampire Diaries, dont Chris Wood et Kristen Gutoskie. Une fiche technique qui a valeur d’argumentaire? Il aura en tout cas fallu ce détour par la case de l’Oncle Sam pour que l’histoire de Cordon se retrouve sur les ondes de la RTBF, dépouillée de son aura anversoise. Un choix curieux a priori, d’autant qu’il y avait là l’opportunité de sortir -justement et fort à propos- du confinement culturel. Directeur de la programmation pour la RTBF, Emmanuel Tourpe nous a expliqué que « Cordon n’existait pas en version doublée. La doubler nous-même n’était pas envisageable pour des questions de budget. » Quant au sous-titrage, moins coûteux et plus rapide que le doublage, il ne semble pas une solution prisée par les téléspectateurs francophones si l’on en croit Emmanuel Tourpe: « Toutes nos séries sont disponibles en multilingue. Les versions originales sont choisies par une partie extrêmement ténue du public, il est donc risqué de tenter l’expérience en prime time. Mais le plus important, c’est qu’une série belge s’exporte, car c’est évidemment une excellente nouvelle pour tout le secteur. » Une série flamande ne génèrerait-elle pas plus d’identification du spectateur que sa version américaine? « Nous avions évidemment observé de près le phénomène Cordon, mais la chaîne américaine The CW a annoncé l’adaptation si rapidement que Containment s’est retrouvé dans le package de notre distributeur Warner peu de temps après la diffusion de Cordon. Nous avons choisi de diffuser cette adaptation de l’histoire de Carl Joos, bien menée et réalisée, dès qu’elle était disponible. »

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Antwerp vs Atlanta

Le téléspectateur gagne-t-il au change? Là où la série de VTM était sobre dans le spectaculaire car toujours en flux tendu avec le réel le plus trivial, Containment va dans le gore, l’hémoglobine, s’étend sur les stigmates du virus et du chaos qu’il occasionne, et ne questionne qu’en deuxième ressort les mécanismes de la confusion. Containment a le goût du sang, de la musique qui claque, quand Cordon acelui du son, de la respiration, de tous ces éléments physiques et corporels qui trahissent subtilement l’angoisse, la colère, le désespoir. En outre, le charme discrètement choral qui se dégageait des premiers épisodes de Cordon, essentiel pour tisser les liens entre les personnages et augmenter les enjeux et les tensions narratives, s’évapore un peu dans un format américain dont les modes de narration sont rompus aux nécessités des timings publicitaires. En revanche, dans une version comme dans l’autre, la série excelle quand elle tend un miroir à l’opinion publique et à son personnel politique, jamais exempts de cynisme, mais trop souvent de courage quand il s’agit de reconnaître ses responsabilités.

Containment, le mardi à 22h25 sur La Une.

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