Critique

[À la télé ce soir] The Imitation Game

The Imitation Game © DR
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

Benedict Cumberbatch incarne avec maestria l’homme qui perça le code allemand Enigma, à qui son homosexualité valut toutefois d’être frappé d’infamie.

Dans un paysage cinématographique saturé de biopics, l’histoire du mathématicien britannique Alan Turing, « père de l’ordinateur », et héros oublié de la Seconde Guerre mondiale avant d’être finalement réhabilité, en valait assurément beaucoup d’autres. Elle inspire au réalisateur norvégien Morten Tyldum (Headhunters) un film passionnant à moult égards, une oeuvre inscrite au confluent de la biographie classique et du récit d’espionnage, tout en s’affirmant ode vibrante à la différence.

The Imitation Game s’ouvre en 1952, lorsqu’une enquête sur un cambriolage débouche sur… l’arrestation de Turing (Benedict Cumberbatch), bientôt accusé d’outrage à la pudeur. L’interrogatoire qui s’ensuit vaut au film son articulation en flash-back, l’horloge du temps s’arrêtant en 1939, au début de la Seconde Guerre mondiale, lorsque le brillant mathématicien issu de Cambridge postule, plutôt bravache, auprès des autorités britanniques afin d’intégrer la Government Code and Cypher School, à Bletchley Park. Et de bientôt prendre la tête de l’équipe en charge du décodage de Enigma, machine de cryptage des opérations militaires allemandes, réputée inviolable. Le temps presse toutefois, et la hiérarchie s’impatiente, irritée encore par l’arrogance du génie, marathonien à ses heures et moins rompu aux rapports humains qu’à la science des chiffres; lequel va pourtant s’obstiner, rejoint dans son combat par Joan Clarke (Keira Knightley), femme dans un monde d’hommes et figure guère moins excentrique à sa façon que Turing.

Le secret, trame d’une vie

Le génie isolé confronté à l’incompréhension et à l’adversité offre un terrain somme toute convenu au film de Morten Tyldum. Pour autant, le volet cryptographique des activités de Turing n’est certes pas dénué d’intérêt ni de suspense, que vient encore relever le secret entourant les opérations, avec à la clé d’éprouvants dilemmes moraux. C’est ce même secret qui apparaît comme la trame de sa vie, The Imitation Game s’attachant encore à la tragédie intime de l’homme, soulignée par la partition d’Alexandre Desplat. Soit l’histoire d’un gamin solitaire à qui son unique ami sera arraché par la tuberculose, avant que l’époque ne le contraigne à tenter de dissimuler son homosexualité, sa relation avec Joan Clarke ne pouvant que donner le change. En pure perte, toutefois, Turing étant poussé au suicide par les persécutions dont il sera l’objet. Tyldum trouve dans ces circonstances matière à étoffer et à humaniser son propos, tout en le rendant plus accessible. Si l’on regrettera une mise en scène fort conventionnelle, eu égard à la personnalité hors du commun de Turing, la composition de Benedict Cumberbatch a raison des éventuelles réserves, l’acteur réussissant à restituer toutes les nuances du personnage. Le genre de prestation dont l’on fait les Oscars, pour lesquels ce biopic a récolté 7 nominations et l’Oscar du meilleur scénario adapté…

DE MORTEN TYLDUM. AVEC BENEDICT CUMBERBATCH, KEIRA KNIGHTLEY, MATTHEW GOODE. 2015.

Ce lundi 20 février à 20h35 sur La Une.

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