Critique

[À la télé ce soir] Atlanta / Llévate mis amores

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Ce jeudi, la géniale série de Donald Glover/Childish Gambino et le premier filim d’Arturo Gonzalez Villasenor.

Atlanta

Série FX de Donald Glover, avec Donald Glover, Brian Tyree Henry, Keith Stanfield. ****

Ce jeudi 15 juin à 21h00 sur Be 1.

Earn a arrêté l’unif, dégotté un boulot de merde et rame sévère avec sa meuf, la mère de sa fille. On est à Atlanta. Dans un monde où Justin Bieber est noir (vraiment) et où on se fait accueillir chez son cousin par un flingue, un couteau de cuisine, un joint et des cookies… Le cousin en question, c’est Alfred, alias Paper Boi (Brian Tyree Henry). Un gros rappeur tendance dealer qui vient d’enregistrer un gros single, est accusé de meurtre et dont Earn se verrait bien devenir le manager. Oubliez le pénible, boursouflé et adolescent The Get Down de Baz Luhrmann. La série hip-hop du moment, c’est elle: Atlanta, le bébé de Donald Glover. À seulement 33 ans, il en est à la fois le créateur, le scénariste, le producteur délégué et l’acteur (Earn, c’est lui). Petit surdoué, Glover, qui écrivait pour la célèbre émission américaine The Daily Show alors qu’il était encore étudiant, a fait sa première apparition télévisée dans 30 Rock et incarnait le sportif blagueur Troy Barnes dans Community. Il a joué dans Seul sur Mars de Ridley Scott, est du prochain Spider-Man, prêtera sa voix à Simba dans le remake du Roi Lion et figurera en 2018 à l’affiche d’un spin-off de Star Wars, où il campera un ami proche d’Han Solo. Le palmarès et l’agenda sont d’autant plus impressionnants que l’hyperactif est également rappeur et se cache sous le nom de Childish Gambino.

Déjà trois albums, une petite dizaine de mixtapes et d’années dans le milieu: Glover connaît bien son sujet, la galère dans le hip-hop et celle d’être un mec de couleur aujourd’hui aux États-Unis. Il le dépeint d’ailleurs ici avec autant de clairvoyance que de sens de l’absurde. « Le sida a été inventé pour empêcher Wilt Chamberlain de battre le record de meufs baisées détenu par Steve McQueen. En 1969, il était le troisième de tous les temps. » « Ah bon. C’était pas par le gouvernement pour tuer les homos? » Les dialogues et les personnages sont parfaits, notamment Darius (Keith Stanfield, le Snoop Dogg de Straight Outta Compton) qui aimerait transformer les rats en téléphones, échange des sabres contre des chiens et appelle son gun Papa… Totalement imprévisible à l’image du septième épisode, décliné en forme de talk-show, de cette première saison (elle en compte dix d’à peine 25 minutes), Atlanta est drôle, nonchalante, touchante, décapante, cruelle et désillusionnée. Elle épingle les organisateurs de soirées qui te paient pas, les plans télé foireux, les blancs qui se prennent pour des noirs et ceux qui savent pas les blairer. Meilleure série musicale ou comique et meilleur acteur pour Donald Glover aux derniers Golden Globes, Atlanta a la cote et aura le droit à une deuxième saison l’an prochain. Irrésistible. (J.B.)

Llévates mis amores

Documentaire de Arturo Gonzales Villasenor. ****

Ce jeudi 15 juin à 22h25 sur La Trois.

[À la télé ce soir] Atlanta / Llévate mis amores

La frontière la plus longue de notre planète séparant un pays développé d’un pays du tiers-monde serpente et s’étire dans le désert entre le Mexique et les états-Unis. Pour la traverser au mépris des dangers et des gardes policières ou civiles, les migrants s’enfournent dans un train surnommé « The Beast ». Le long du trajet, les Patronas, groupe de femmes mexicaines, leur balancent victuailles ou produits de première nécessité. Et ça dure depuis 1995 avec, parfois, quelques échanges et rencontres qui brisent la monotonie d’un exode misérable. Pour son premier film, Arturo González Villaseñor réalise un carnet de route intime et sans fioritures, tant la force du propos suffit: il y donne l’occasion de témoigner de ce quotidien à des femmes qui ont renoncé à tout pour aider ceux et celles qui n’ont rien. Bravant les coups de menton de l’Oncle Donald, leurs voix lancent aux hommes comme au monde: « Levez-vous, mes amours ». Sur ces portraits bouleversants d’humilité, pendants féminins et mexicains de Tom Joad, veillent les mânes de John Steinbeck et de Victor Hugo… (N.B.)

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