YouTube veut imposer sa loi aux artistes… et exclut Adele et Arctic Monkeys

Adele © REUTERS/Mario Anzuoni
Kevin Dochain
Kevin Dochain Journaliste focusvif.be

YouTube va lancer son service de streaming pour concurrencer Spotify et Deezer. Problème: la part réservée aux artistes est minime et les indépendants ragent.

Le site de vidéos qui appartient à Google va prochainement lancer son service de streaming, similaire à Spotify ou Deezer. L’idée est simple: en plus des vidéos, toujours accessibles moyennant de la pub, le contenu uniquement musical sera disponible en streaming (et sans pub) moyennant un abonnement. Seulement, il y a un hic: les conditions financières proposées aux artistes par YouTube étant médiocres, toute une série de labels indépendants a décidé de ne pas emboîter le pas. Parmi ceux-ci, XL Recordings, 4AD ou Domino, labels qui hébergent entre autres Adele, les Arctic Monkeys ou encore Vampire Weekend. Et qui dit refus de contrat, dit blocage des artistes concernés sur la plateforme vidéo de Google: selon le directeur des opérations commerciales de YouTube, Robert Kyncl, le blocage surviendra « dans les jours qui viennent », prévient-il dans les pages du Financial Times.

Trois majors du disque, à savoir Universal, Warner et Sony, ont déjà embrayé le pas et accepté une avance d’un milliard de dollars sur les trois années à venir. Mais environ 10% du catalogue musical de YouTube s’estime lésé et tente un forcing. Lors d’une conférence de presse tenue début juin, les indépendants concernés ont d’ailleurs dénoncé les conditions tarifaires « fortement défavorables » et « non négociables ». Il est prévu de porter l’action devant la Commission européenne, comme le souligne le Figaro.

Le problème derrière tout cela pourrait se résumer en deux temps. D’une part, la position de force de Google dans le secteur: si son service de streaming Google Play s’est cassé la figure et est sans doute à reléguer parmi les échecs du groupe, à côté de Google Plus, YouTube est -et reste- quant à lui le premier moyen d’accéder à de la musique gratuitement sur Internet, bien loin devant Spotify ou Deezer. Soit directement, soit via des plateformes à la limite de la légalité qui se multiplient récemment et puisent de manière automatisée dans son catalogue, tel Blitzr ou Whyd. Il est donc aujourd’hui techniquement difficile, surtout pour les majors du disque qui rattrapent une bonne partie des pertes sur leurs ventes en revenus YouTube, de dire non à un acteur qui est devenu incontournable.

D’autre part, si l’idée même du streaming part (souvent) d’une idée noble (on sait, pour avoir rencontré les gens derrière Spotify et Deezer, qu’il s’agit de réels amoureux de la musique désireux avant tout de faire avancer l’offre légale sur le Web et contrer le piratage), le système a surtout ses points faibles. Et comme les services se multiplient (Beats Music, Google Play, Amazon Prime, ou Qobuz et Pono au rayon hi-fi…), la concurrence joue et a tendance à faire descendre les prix vers le bas: intéressant financièrement pour le consommateur, certes, mais ramenant de plus en plus la part réservée aux artistes à une portion congrue. À dire vrai, si nous faisons partie des fervents défenseurs du streaming -qui ne doit pas pour autant éluder totalement le fait d’acheter de la musique au format physique!-, on en viendrait presque aujourd’hui à rejoindre les rangs des chiens de garde anti-streaming que sont Thom Yorke et… Adele, aux abonnés absents de Spotify & co dès le début.

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