Elizabeth la grande, dernier monstre sacré ?

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Fut-elle l’ultime grande star hollywoodienne ? La reine Elizabeth Taylor est entrée au panthéon du 7e art, après huit mariages et -surtout- une cinquantaine de films.

A l’annonce de sa mort, on ne peut s’empêcher de sentir qu’une page de l’histoire se tourne. Définitivement. Même si elle ne tournait plus, depuis des années déjà, Elizabeth Taylor incarnait toujours la star absolue, la diva définitive, la dernière grande étoile au firmament d’une industrie américaine du film bien éloignée aujourd’hui des splendeurs du système hollywoodien de jadis. Elle aura commencé sa carrière à… 10 ans, et avec pour partenaire… une chienne, la célèbre Lassie. Et elle l’aura terminée en 1994 en participant à… un film d’animation préhistorique (The Flintstones). Une double bizarrerie pour encadrer une carrière riche de deux Oscars de la meilleure actrice, de personnages hors-normes et fascinants, de succès fous et d’échecs fracassants, sans oublier quelques sulfureux scandales, car la Taylor était une forte nature, une amoureuse exclusive, dont les huit mariages (dont deux avec Richard Burton) témoignent des nombreux et passionnés élans.

Elle était déjà fine comédienne au sortir de l’enfance, et l’adolescence lui fit monter quatre et quatre les marches vers la gloire. Mais c’est à 18 ans que s’ébaucha -dans le somptueux A Place In The Sun de George Stevens- l’image d’une star alliant une frémissante beauté à cette inexplicable évidence qui fait de certaines actrices les vecteurs de désir d’un public subjugué. Une image faite de sophistication et en même temps de sensualité franche, une image dont quelques grands cinéastes trop peu nombreux (le Richard Brooks de Cat On A Hot Thin Roof, le Joseph L. Mankiewicz de Suddenly Last Summer et de Cleopatra), le John Huston de Reflections in A Golden Eye et le Joseph Losey de Secret Ceremony), surent laisser s’épanouir devant leur caméra. On ajoute Giant (de George Stevens, encore) et Who’s Afraid Of Virginia Woolf ? (Mike Nichols), et le tour des très bons films est bouclé. Trop peu, assurément, pour une artiste dont la personnalité, le tempérament, les côtés  » difficiles « , inhibèrent sans aucun doute quelques réalisateurs et nous privent de rencontres au sommet avec la fascinante actrice. Elizabeth Taylor était bel et bien un de ces monstres sacrés (Marlene Dietrich, Bette Davis, Barbara Stanwick, en furent d’autres) que les hommes craignent autant qu’ils ne subissent leur fascination. Une icône certes, mais en mouvement, échappant au cadre imposé d’une certaine image de la féminité vendue par Hollywood.

Louis Danvers

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