Critique | Musique

Danny Brown – Old

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

HIP HOP | Le rap a toujours fait de la place aux excentriques -de Ol’ Dirty Bastard à Busta Rhymes. La ola donc pour Danny Brown, tête grillée qui sort un 3e album épatant.

Danny Brown - Old

Danny Brown est un drôle de cas. A 32 ans -à peine quatre de moins que Kanye West-, il est régulièrement cité parmi la nouvelle génération de rappeurs 2.0, au milieu de « gamins » qui ont souvent à peine dépassé les 20 piges. Par ailleurs, son nouvel album, Old, a beau être l’un des plus attendus de 2013, il n’est, sauf erreur, disponible ici qu’en import. Reste donc Internet. Cela tombe bien, c’est aussi par là que tout a commencé ou presque pour Danny Brown…

L’état civil d’abord. Daniel Dewan Sewell est né à Detroit en 1981 -soit un an avant que le grand magasin Hudson’s, le plus important du monde dans les années 60, ne ferme ses portes, dernier commerce important du centre-ville. Sa mère a 17 ans, son père 16, quand big Dan vient au monde. Dans la ville-fantôme, il passe entre les gouttes, jusqu’à ses 18 ans. Divorce des parents, petit deal de drogues, passage par la case prison. Living just enough for the city… Et le rap comme bouée de secours. En 2011, son 2e album, XXX, est lâché en téléchargement gratuit et fait le buzz. « Mon but avec ce disque était de récolter un maximum de critiques positives. » C’est gagné, avec la manière en plus. Hip hop et barré, citant aussi bien Funkadelic que Joy Division, Danny Brown s’attirait à la fois les grâces du public rap et celles des amateurs de trip musical plus indé.

Autant dire qu’Old était attendu au tournant. Il faut d’abord passer outre la pochette, probablement l’une des plus laides de l’année. Certes, qui se soucie encore du visuel, quand un disque déboule aujourd’hui d’abord sous la forme d’un fichier à télécharger? Peut-être Danny Brown justement. Pour son 3e album, le rappeur de Detroit a même découpé le disque en deux faces, A et B. Comme une manière de redonner du poids à un format album qui en a pas mal perdu. Ou encore une façon d’illustrer le double visage du personnage?

Old school

Car sur Old, Brown se pose et explose. Dr Jekyll et Mr Hyde. D’un côté, il y a donc le rappeur cintré, le flow nasal, les cheveux en pétard, le groove acide. C’est lui qui truste la face B, lorgnant du côté de la trap music -voir par exemple Break It (Go). L’exercice est parfois éreintant, mais il fait partie intégrante de la personnalité droguée du bonhomme. L’autre facette de Brown est plus réfléchie. Ou plus déprimée, c’est selon. Morceau de descente (Clean Up), film d’horreur qui tourne en boucle (Torture) ou nostalgie cabossée (Wonderbread). L’ego trip est surtout une fuite en solitaire (Lonely), une errance urbaine et jazzy (la basse hantée et la flûte asthmatique de The Return).

A jouer sur les deux tableaux, Brown aurait pu se perdre. Malgré sa schizophrénie, Old tient pourtant debout, électrique de bout en bout. L’année hip hop a déjà délivré quelques disques excitants, de Yeezus à Nothing Was The Same en passant par Acid Rap ou Doris. On peut désormais y ajouter Old

  • DANNY BROWN, OLD, DISTRIBUÉ PAR FOOL’S GOLD.

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