Festival Anima: les pépites asiatiques oubliées du palmarès

© PRODUCTION I.G.
Stagiaire Le Vif

L’Asie est repartie bredouille du festival Anima malgré une sélection solide. Padak et Lettre à Momo avaient pourtant tout pour plaire.

Il n’y aura pas de trophées cette année aux pays du matin calme et du soleil levant. Le palmarès, dévoilé hier, n’a honoré aucun des sept longs-métrages asiatiques en compétition. Le voyage de M. Crulic, du Roumain Anca Damian, a remporté deux prix, et Tad l’Explorateur de Enrique Gato a conquis le jeune public. Les séances étaient en tous cas souvent bien remplies pour voir les films sud-coréens et japonais. Nous vous avions déjà parlé d’Asura, desEnfants Loups et de The King of Pigs. Deux autres films méritent que l’on s’y attarde: Padak, du coréen Lee Dae-hee et Une lettre à Momo de Hiroyuki Okiura.

Padak, de Lee Dae-hee (2012) – Maelstrom d’émotions dans un bocal

Passer plus d’une heure en compagnie de poissons captifs, voilà le pitch surprenant de ce film sud-coréen. Attention, quand même: oubliez votre bel aquarium de maison et ses poissons exotiques. On est ici chez un poissonnier, les personnages de Padak peuvent donc être achetés et dévorés à tout moment. Gagnés par la peur de mourir, les résidents se sont soumis à un vieux poisson plat qui fait sa loi dans le bassin. Tout juste arrivé dans la bande, Padak sera le seul à se révolter et à vouloir regagner l’océan. C’est ainsi qu’un film sur des poissons devient une réflexion dure sur l’espoir et la soumission dans un contexte de survie.

Au premier regard, les images de synthèse de Padak ne sont guère séduisantes. A moins d’aimer la pèche, difficile d’être attiré par ce décor portuaire poisseux. Et pourtant, le sourire de Padak et sa soif de liberté sont d’emblée attendrissants. Le fougue de ce jeune maquereau éloigne Padak de la noirceur écrasante de The King of Pigs, son homologue coréen. Le film ose même la poésie, avec ces très jolis rêves chantés d’évasion dans l’océan. Hélas, pendant ce temps, les clients ont faim, et c’est le couteau de l’homme qui tranche. Le destin funeste des poissons les rattrape, un jour ou l’autre. Traiter frontalement de l’obéissance sous une dictature avec des poissons, personne n’en rêvait, mais Padak l’a fait, et avec talent.

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Une lettre à Momo, de Hiroyuki Okiura (2011) – Monstres de compagnie

Douze ans après Jin-Roh: la brigade des loups, Hiroyuki Okiura retrouve le chemin des salles obscures avec Une lettre à Momo. Bien moins sombre que Jin-Roh, le film a d’ailleurs attiré de nombreux enfants lors de la séance en VF du samedi après-midi. Les bambins ont découvert l’histoire de Momo, une jeune fille orpheline de père qui déménage avec sa mère sur une île isolée. Elle conserve en secret une lettre que son père avait commencé de lui écrire avant sa mort, commençant par « Chère Momo ». Elle ne pense d’ailleurs qu’à ça, peu intéressée par la campagne environnante qui lui fait regretter Tokyo. Cet été ennuyeux prendra un virage inattendu quand elle rencontrera trois « yokaï », des créatures japonaises mythiques chargées de la protéger.

Une lettre à Momo laisse d’abord une impression de déjà-vu. Dans l’animation japonaise, il n’est pas rare que le surnaturel fasse irruption sur le chemin d’un voyage initiatique. En 2001, le grand maître Hayao Miyazaki envoyait la petite Chihiro apprendre la vie dans un établissement de bains tenu par une sorcière. Et dans la série Kamichu!, une collégienne se réveillait un jour avec la faculté de voir les créatures invisibles. Mais en vérité, c’est moins un manque d’originalité qu’une nouvelle preuve de la cohabitation tranquille des japonais et du surnaturel. Et si cette histoire est on ne peut plus classique, le film est tellement juste, drôle et passionnant qu’on le lui pardonne.

Quelle surprise d’ailleurs de ne pas le retrouver au palmarès! Enfants et parents ont parus embarqués, les premiers riant de bon coeur, les second lançant des « bravo! » Pas encore sorti en Belgique, le film pourrait faire quelques entrées s’il tombe entre les mains d’un distributeur sérieux. Toute la famille pourrait se déplacer: l’humour qui accompagne les trois monstres ne les rend pas effrayants aux yeux des petits. Ici, pas de créatures angoissantes comme dans certains films de Miyazaki, ni de surréalisme cauchemardesque comme chez Satoshi Kon. Gloutons mais gentils, irresponsables mais amusants, nos trois « yokaï » ne peuvent effrayer que les plus impressionnables. Quant aux parents, le film les aidera peut-être à mieux comprendre leur ado. En effet, au-delà de son humour, le film traite avant tout d’un deuil profond, partagé par une mère et une fille qui n’arrivent plus à se parler. La solution, comme souvent, viendra du coeur et d’une meilleure compréhension mutuelle. Rien de très nouveau, encore une fois, mais quand les choses sont bien dites, il n’y a pas de mal à les répéter.

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Lucas Godignon (stagiaire)

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