RBMA (3) : Un Belge à New York

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Mercredi, Red Bull Music Academy, toujours du côté de Chelsea, New York. Couleur du jour : le rouge. Et le noir…

Le noir d’abord, comme les tenues de Ryuichi Sakamoto et Alva Noto, qui le soir ont donné un concert au Metropolitan Museum. Un trip musical éminemment cérébral (un Japonais et un Allemand sur scène, vous vous attendiez à quoi ?), voire rêche (le public a besoin de 4 morceaux avant de lâcher ses premiers applaudissements) et pourtant intense et passionnant, magnifiquement tiraillé entre le pointillisme de Sakamoto au piano et les infrabasses terrassantes d’Alva Noto.

Noir aussi comme les lunettes de Chris Stein et Debbie Harry. Les deux éminents membres de Blondie sont passés le matin par l’Academy pour y donner une  » lecture « . Autant dire qu’ils y étaient comme à la maison. Sous une improbable veste à épaulettes et coudières en plastique ( ?), Debbie Harry arborait par exemple un t-shirt des Ramones :  » Je viens de la gym, j’aime bien porter ce t-shirt quand je fais du sport « . Question du présentateur : le New York d’aujourd’hui ressemble à celui de leur folle jeunesse, dans les années 70 ? Stein :  » It’s a complete opposite animal. « . Harry :  » A l’époque, quand je disais que je vivais à New York, on me regardait avec des yeux effrayés. La ville était en faillite. Un peu comme Detroit aujourd’hui. « .

Le rouge ensuite. Comme la veste, la barbe et la tignasse de Lee Scratch Perry, lui aussi invité à s’asseoir dans le canapé de l’auditorium, aux côtés d’Adrian Sherwood. A 77 ans, le légendaire producteur reggae-dub (Marley, Max Romeo,…) reste un plus que jamais un extraterrestre. Rigolard, il fait le show, tandis que l’intervieweur s’accroche pour saisir à la fois le patois jamaïcain du bonhomme et ses explications fumeuses sur Dieu, la vie, la mort, et… le pum pum. Résultat : à la fin de la  » lecture « , les jeunes  » académiciens  » défilent pour prendre une photo avec Lee Perry.

Parmi eux, DJ Slow, alias Thomas Duval, vêtu d’un t-shirt… rouge. Celui de son label Pelican Fly, en l’occurrence. DJ Slow est le Belge de la RBMA 2013, faisant partie des 62 élus parmi les 4000 candidatures venues du monde entier. Il a pourtant bien failli ne jamais venir.  » Le dernier jour de remise des candidatures, je suis arrivé au bureau de Poste, à De Brouckère. C’était celui qui ouvrait le plus tard. Il fermait à 18h. Je suis arrivé à 18h02. Ils ont quand même bien voulu prendre mon pli et apposer le cachet. «  Thomas Duval est d’abord DJ –  » un mix entre mes influences techno-house anglaises et hollandaises et ma passion pour le hip hop et le r’n’b « . Il est également apprenti producteur, et donc patron de label. L’argument qui a convaincu le jury ?  » Franchement, je n’en sais rien. On ne reçoit pas vraiment de feedback. Je pense qu’ils insistent sur l’enthousiasme et la passion que vous mettez dans votre démarche. Le formulaire à remplir est quand même conséquent, plus de 50 pages, avec des questions du genre  » quand avez-vous pleuré pour la dernière fois ? « . J’y ai répondu de la manière la plus sincère et honnête possible. D’ailleurs, je ne l’ai montré à personne. Mes réponses resteront secrètes (sourire) « .

Pelican Fly a le vent en poupe, au point de voir certaines de ses productions pointées par Diplo, Brodinski… Du coup, Thomas Duval a décidé de quitter son boulot et de tout miser sur la musique, sa passion.  » Je vais avoir 30 ans. Il est temps de se lancer pour ne pas avoir de regrets. «  Cela semble une bonne idée : des sets sont déjà programmés à Paris, en Allemagne, Israël… En Belgique, DJ Slow a été ajouté à l’affiche du festival de Dour, tandis que Pelican Fly aura droit à sa label night, au club de l’AB, le 22 juin. On en reparle…

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content