Critique | Musique

Tame Impala – Lonerism

© DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

ROCK | Les Australiens de Tame Impala reviennent avec un deuxième album touffu, toujours obsédé par le rock psyché des années 60. Y a du monde sur la corde à linge…

Tame Impala, Lonerism, distribué par Universal. ***

Le passé, c’était quand même mieux avant. Quand il ne donnait en tout cas pas l’impression d’envahir tout l’espace de jeu musical. Retromania ad libitum, jusqu’à la nausée. Pas seulement dans l’inflation toujours plus importante de rééditions et autres reformations. Mais aussi dans les revivals récurrents. Avec son premier album Innerspeaker, le combo australien Tame Impala (en vrai, le seul et unique cerveau passablement drogué de Kevin Parker) plongeait dans le bain psychédélique circa 66-67. Tête baissée, mais avec du flair et un talent certain. Cela n’empêchait pourtant pas de tiquer. Surtout qu’à bien des égards, le rock psyché en 2012 est le genre de resucée encore plus délicate à manoeuvrer que, au hasard, la soul vintage ou le blues version 2.0. D’abord parce qu’il a été momifié dans une série de sons et de gimmicks musicaux très forts, directement identifiables (la guitare fuzz). Ensuite, parce qu’il était censé, à la base, amener ailleurs, dans un autre état, un autre monde. Meilleur ou en tout cas différent, mais certainement pas ancien, vieux dans ce cas-ci de près d’un demi-siècle…

Autarcie aussie

On s’en fout? Il semble bien que oui, au vu de l’emballement de la critique rock pour le nouveau Lonerism (un rare 9 sur 10 pour la référence Web Pitchfork, vraiment?). Soit. Un peu comme le parcours de Jack White, Tame Impala n’a d’autre intérêt que ses disques. Car, fi de toute branlette esthético-idéologique, Lonerism est un album solide. Enorme. Pas le genre à s’excuser d’être là, ou à débouler par distraction. Un disque qui tire un bon coup sur son joint, se retrousse les manches, et fonce tout droit, à la fois roublard et pas non plus complètement dupe (Feels Like We Only Go Backwards). Le genre aussi dans lequel on embarque dès la première seconde (Be Above It, voix « lennonesque », claviers prog, et surtout Endors-toi (sic), batterie en cascade, brumes psyché, et petit solo de guitare bourdonnante), ou face auquel on reste complètement à quai. Plus direct et instantané que son prédécesseur (le single-tuerie Elephant), Lonerism n’en reste pas moins un disque touffu. La plupart des morceaux semblent notamment obsédés par le Tomorrow Never Knows des Beatles (Revolver, 1966).

Cela étant dit, Kevin Parker reste malgré tout de son époque. Là où les originaux passaient des heures en studio à jongler entre les pédales d’effets, à inverses les bandes, Parker a composé et joué la plupart des morceaux de Lonerism seul, entre deux hôtels. Comme son titre l’indique, le nouveau Tame Impala est donc bien un disque solitaire, voire autarcique. Paradoxalement, il n’en est pas moins exubérant, un véritable monde sonore en soi. A l’image du titre Nothing That Has Happened So Far Has Been Anything We Could Control, qui s’emballe en cours de route, partant en vrille sous les coups de batterie, tailladé à grand renfort de claviers cosmiques… The dream is over, chantait Lennon. Pas tout à fait sûr…

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content