Critique | Livres

David, les femmes et la mort

Pour sa 2e oeuvre seulement, après La jeune fille et le nègre réalisé lui en noir et blanc, Judith Vanistendael frappe fort, et là où on ne l’attendait pas.

DAVID, LES FEMMES ET LA MORT, DE JUDITH VANISTENDAEL, ÉDITIONS DU LOMBARD. ****

David était, avant de faire son apparition sur la première planche, un quinquagénaire comblé. Une 2e épouse, une grande fille, une 2e fille sur le tard et enfin, une petite-fille. Une famille moderne et recomposée qui doit faire désormais avec 2 nouveaux membres: une tumeur supra-glottique de type T3N2M0, et puis le silence qui accompagne souvent un cancer de la gorge, avant même qu’il ne s’attaque à vos cordes vocales. Cette tumeur et cette difficulté d’en parler, d’affronter autrement que seul le délitement, vont accompagner la vie de David et de ses femmes. Jusqu’au bout, jusqu’à l’inexorable. Et jusqu’au terme de ce splendide et imposant roman graphique, entièrement réalisé à l’aquarelle, à l’image d’un Brecht Evens (Les Noceurs).

Pour sa 2e oeuvre seulement, après La jeune fille et le nègre réalisé lui en noir et blanc, Judith Vanistendael frappe donc fort, et là où on ne l’attendait pas. La jeune Bruxelloise puise par contre à nouveau dans son intimité -des membres de sa famille ont été touchés par le crabe- pour en tirer un récit universel qui parvient à mêler le tragique et le beau, l’onirisme et la crudité, les chambres stériles et les rires d’enfants. Son regard d’auteure porte une lumière inédite sur cette maladie et ses dégâts collatéraux, ne se refusant aucune émotion, ni tabou -la question de l’euthanasie ne sera pas contournée. « La plupart des gens cachent leur sentiment et leur effroi face aux douleurs intolérables, explique l’auteure. Je crois au contraire qu’affronter, accepter et verbaliser ce que l’on ressent, permet de s’en extraire. » On ne peut en tout cas pas rester insensible devant ce roman graphique, qui va faire parler de lui. Judith Vanistendael tiendra d’ailleurs une conférence-débat ce vendredi 20 janvier, à la librairie-galerie Brüsel, à Bruxelles.

O.V.V.

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