Stromae, en équilibriste

C’est officiel: Stromae n’est pas que l’homme d’un seul tube. La preuve avec son spectacle, efficace et malin.

Il n’était pas obligé. Fort d’un carton interplanétaire, Stromae aurait pu encore se contenter longtemps de chanter son tube en playback sur les podiums estivaux. En fait, on ne lui en aurait même pas voulu. A la place, le Bruxellois a cherché à troquer au plus vite son costume, apparemment trop étriqué pour lui, de one hit wonder. Bien vu. Avec un premier geste fort: celui d’inaugurer son spectacle aux Transmusicales de Rennes, festival qui a l’habitude de faire son marché chez le petit maraîcher du coin plutôt que dans les grands supermarchés discount.

Ce spectacle, il le donnait pour la première fois en Belgique sur les planches de l’Orangerie, au Botanique, mardi soir. Avec un show déjà bien rôdé. Cela commence avec un décor d’appartement sixties stylisé en noir et blanc. Arrivé seul sur scène, Stromae va rapidement chercher en coulisses deux camarades, chapeaux melons à la Dupont (ou Magritte, c’est selon), plantés tels des robots devant leur  » station  » claviers-drum kits. La scénographie est simple mais ingénieuse, exactement comme la musique de Stromae, qu’il prend toujours un malin plaisir à décortiquer en direct (la leçon de Summertime). Bien sûr, Stromae a trouvé une formule – en gros, un fond hip hop, des gimmicks eurodance, et des textes plombés, voire misanthropes. Mais sur scène, il arrive à ce qu’elle ne tourne pas à la simple recette. Te Quiero, par exemple, prend ainsi tout à coup des allures de bolero cubain, tandis que Peace Or Violence quitte quelques instants l’autoroute pour prendre une tangente quasi dubstep.

Dans la salle, bourrée, cela parle français, pas mal flamand aussi, anglais… Stromae, métisse bruxello-rwandais, comme dernier Belge ? Avec Arno alors, qui le rejoint le temps d’une relecture de Putain, Putain. Si ça c’est pas symbolique… Comme quand Stromae cite le Pump Up The Jam de Technotronic dans une première version d’Alors, on danse. En rappel, il rejouera son tube, en version symphonique, devant les images d’un orchestre. Il se prend alors pour le Brel qu’il n’est pas. Mais il n’arrive toujours pas à être grotesque. Fort.

C’est clair, Stromae est malin. L’un des seuls capables aujourd’hui de se balader sur le fil ténu entre accessibilité et démarche artistique, à produire de l’entertainment qui ne soit pas du simple vidage de cerveau. Certes, on ne sait pas si Stromae ira loin. Mais à vrai dire, on en a très envie.

Laurent Hoebrechts

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