Au nom du père, du fils et du retrait de permis

Lundi, c’est simple et funky. Notre chroniqueur Guillermo Guiz a sillonné quelques places to be du week-end, et a eu chaud, très chaud. Night in Night out, épisode 28.

Ca commence par une grande nouvelle. Qui risque de créer pas mal de remous, notamment chez les plus sceptiques d’entre nous: Dieu existe. La preuve irréfutable, celle que, de Descartes à Matt Pokora, les mondes scientifiques et religieux pourchassaient depuis des siècles, m’est apparue samedi nuit, en plein boulevard Général Jacques. On me l’aurait demandé à l’époque, j’aurais clairement émis un doute: une révélation d’une importance aussi cruciale me semblait devoir intervenir, au moins, sous les arcades du Cinquantenaire ou devant le WE du shopping de Woluwé. Dans un lieu classe quoi. Ben non, les voies du Seigneur (vite, une farce: est-ce que Dieu est plouc, et sort au Lord? Pardon), sont manifestement aussi impénétrables qu’ixelloises.

Avis à la population donc: Dieu se cache sous l’enveloppe corporelle sournoise et banale d’un flic de Bruxelles. Un flic avec une sorte de matraque fluorescente et une chasuble orange. Un flic qui, à 5h du matin, te sauve la life façon Hollywood dans le plus improbable script à sueurs froides du monde. Pour des raisons qui me prendraient huit plombes à détailler, mon permis de conduire est toujours en cure de désintox au tribunal de police, sans que les rouages de la justice comprennent que pour chroniquer la vie nocturne de mes compatriotes, la Ploucomobile fait figure d’alliée incontournable. Comme un crabe, j’ai roulé samedi soir. Comme un crabe, j’ai siphonné quelques verres. Oh, rien de bouleversant, vraiment, mais juste de quoi exciter un éthylotest attentif. Comme un crabe, je suis tombé sur un contrôle de police. Sans permis. En sursis. Crétin des Alpes (© mon paps).

T’as en tête la musique des Dents de la Mer? Difficile à retranscrire en mots, mais c’est à peu près ce que j’ai ressenti quand les amis de la maréchaussée sont apparus dans mon pare-brise. Ok, je vais finir au poste. Ok, je pourrai à nouveau conduire en 2021. Ok, l’amende va me pousser à vendre un rein. Le sang glacé, littéralement. « Bonsoir, je peux vous demander d’où vous venez », me glisse donc gentiment Dieu-Serge-le-policier. A ce moment précis, je suis Clarisse Starling. Et lui Hannibal Lecter. « Heuu… » Esprit qui s’affole. Trouver une excuse? Genre je viens de mon groupe de soutien aux victimes du tremblement de terre au Japon? « Ben du Wood en fait. » Rien de tel que la vérité (Jean, verset 6). « Est-ce que vous avez consommé des boissons alcoolisées », poursuit Serge devant mon souffle coupé. « Ben franchement, pour le coup, pas beaucoup! » Rien de tel que la vérité (Matthieu, verset 2). « Est-ce que vous allez loin? », s’adoucit Dieu, pour voir si je réagis bien aux stimuli Fear Factor et si mon coeur tient le coup à 700 pulsations/minute. « Non, vraiment, au bout de la rue, à Montgomery. » Rien de tel que la vérité (Tony Montana, verset 1er), même si la rue en question est la plus longue de la ville. « Allez-y, c’est bon. » Tu m’as déjà vu danser la polka?

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Je suis passé, motherfucker! Sans casse. Certes, avec le siège conducteur gorgé d’un filet d’urine négligemment échappé, mais qu’importe: Dieu m’a envoyé un signe. Il m’a dit: ne conduis plus jamais sans permis imbécile-heureux-content-d’être-bête (© mon paps), surtout en ayant bu et en récidive aggravée. Puis il m’a dit: je te tiens à l’oeil petit scarabée, et dis à tes amis lecteurs que pour éviter l’infarctus, rien de tel que 1) la vérité 2) de rouler droit dans ses bottes. Puis il m’a dit: continue à avoir une tête de gentil blanc, ça ne fait pas de mal pour passer les contrôles routiers. Puis il m’a dit: tiens, au fond, c’était bien la Bozar Night? Ca, c’est tout Dieu…

Avant d’être réduit en boule de tremblote, j’étais effectivement passé par la Bozar Night. Sous l’impulsion de Darko notamment, le vaisseau ciselé par Horta commence à avoir l’habitude de vibrer à la sauce BPM. Mais la particularité de la Bozar Night, c’est d’effriter les frontières entre monde culturel et dancefloor: performances et expos en présoirée laissent progressivement place aux empoignades musclées des DJ’s électroniciens, en espérant que les foules branchées art rencontrent les oiseaux de nuit, et inversement. Le Palais des Beaux-Arts, c’est un monstre. Avec une gueule pas possible en mode night. Light-show, son, configuration du Hall Horta: dans une curieuse ambiance de rave-party pour bobos arty, cette soirée suintait la classe. Même s’il fallait se farcir du dubstep en bas et les agressions sonores de T. Raumschmiere en haut. DJ punk-techno allemand, T. le tatoué avait mangé toutes les vitamines de l’armoire, apparemment. « Ca sonne vraiment allemand ce truc, non? », fis-je remarqué à mon excellent confrère musical Laurent Hoebrechts, qui me répondit, aussi disert qu’à l’accoutumée, je cite: « Oui ».

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Clairement, même si mes oreilles de choupinet, encore un peu endolories par les excès des soirées précédentes, ont difficilement souffert cette bastonnade en règle, faut l’avouer: de toutes les soirées installées dans d’inhabituels récipients à beats, la Bozar Night m’apparaît comme l’une des plus convaincantes. Situation, situation, situation. Les trois critères-rois du marché immobilier s’appliquent (un peu) volontiers (juste un peu) au monde de la nuit: le contraste entre la Bozar Night et les Pias Nites renforce ce parallèle un brin oiseux, mais frappant samedi soir. Sur le coup de 21h09, dans l’un des entrepôts de Tour & Taxis, les Londoniens de Faithless débarquaient triomphalement devant dix milles rétines complètement conquises. Regard batracien, en plein délire christique, Maxi Jazz plantait son dub mâtiné d’électro synthé-bourinne dans un concert à l’énergie indéniable, mais tenu dans une salle aussi agréable qu’une tique dans le mollet.

Faithless, dont c’était probablement le dernier concert à Bruxelles avant séparation, faut aimer sur la longueur. De fait, après God is a DJ (alors que clairement, c’est un flic bruxellois), Mass Destruction et forcément Insomnia, suis allé reprendre des forces dans la salle d’à côté, sur l’un des transats gentiment mis à disposition par la célèbre maison de disque. N’en suis sorti qu’une grosse heure plus tard, histoire d’alimenter sur les (De-) bords ma théorie situationniste: le set de Junior Jack, associé à Kid Creme, avait beau tenir parfaitement la route (malgré les jérémiades pompantes d’un MC du crew house Defected), l’entrepôt restera toujours plus adapté au déchargement de marchandises qu’au partage de la musique. Surtout après deux soirées compliquées, notamment celle du vendredi.

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« Avoir un bon copain, voilà ce qui a de meilleur au monde. Oui car un bon copain, c’est plus fidèle qu’une blonde. » Quoi mes références? Avoir un bon copain, quand il a presque vingt piges de plus que toi, ça signifie plusieurs choses. Du bon manger, du bon vin, du bon parler de la vie. Puis un choix, à l’instant de choisir l’après-resto. Un bon copain plus âgé, tu l’emmènes au Zanzibar vendredi soir, pas au Wood. Et au Zanzibar, quand tu croises une jolie fille, pas besoin de se creuser l’hémisphère gauche pour sortir la catch-phrase qui tue: « Qu’est-ce qu’une nana comme toi fout au Zanzibar? » Heureusement (ou pas), la situation se présente rarement, mais les mojitos sont bons. Et on passe du Nina Sky. Avoir un bon copain plus âgé, c’est un risque: le risque de s’éclater à la cool, au point de dilater le temps et de débarquer, dégommé comme en 40, au day one des Pias Nites. A 4h du mat’.

Ratés Crystal Fighters, Cassius, Aeroplane. Suis arrivé pour Mustang, comme un samedi au Libertine, mais juste après m’être battu avec une grille à l’arrière de l’entrepôt, en essayant de passer en force malgré l’interdiction des entrées tardives. Jeans déchiré, balafres sur le corps, cohérence de Moscovite en plein dégel vodkaïque: curieusement, et je me souviens de la scène comme de mon premier biberon, les agents de sécurité m’ont laissé pénétrer dans la salle où s’ébattaient les derniers Mohicans de la soirée. Une grosse centaine de persévérants pour une sauterie finissante, remplie grand max aux 2/3 quelques heures plus tôt, m’a-t-on raconté. Juste le temps, finalement, d’être scandaleux et de me préparer à la plus grande frayeur de l’année donc, quand le Seigneur tout-puissant (de Mazembe) s’est déguisé en Pinot simple flic. Et bien franchement, plus on avance, moins ça s’arrange. A la semaine prochaine. Si D. le veut. Rideau.

Guillermo Guiz

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