Mostra de Venise, le film du jour (3): Die Frau des Polizisten, de Philip Gröning

Philip Gröning, réalisateur de Die Frau des Polizisten (La femme de l'officier de police) © IMAGEGLOBE/Gabriel Bouys
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

Si son nom n’est guère familier du grand public, le réalisateur allemand Philip Gröning s’était fait connaître des cinéphiles il y a quelques années avec Die Grosse Stille, étonnant documentaire sans paroles sur les moines de la Grande Chartreuse.

Die Frau des Polizisten, son premier long métrage de fiction, s’intéresse pour sa part au quotidien d’une famille de la classe moyenne allemande – un policier, sa femme, et leur fillette -, entreprise que le cinéaste poursuit sur près de trois heures, en la divisant en 59 chapitres.

Saisissant découpage que celui-là, qui ne manque pas d’intriguer, avant que la litanie des fondus au noir ouvrant et refermant chaque vignette, et barrés de la mention « Anfang Kapitel 1 », « Ende Kapitel 1 » etc, ne produise un troublant effet de distanciation. Et le spectateur d’observer le malaise gangréner insensiblement ce qui n’était qu’un bonheur de façade, tandis que la violence domestique, physique et psychologique, s’installe, insidieuse avant de se faire insupportable. C’est bien d’un voyage au bout de l’enfer qu’il est ici question, que Gröning observe à la façon d’un entomologiste. Si la matière est âpre, la manière ne l’est guère moins en effet, qui fait de Die Frau des Polizisten une expérience de cinéma aussi fascinante qu’inconfortable, dont la durée extensive – on se croirait, par moments, dans quelque déclinaison absurde d’un reality-show – ne fait qu’accroître l’impact. Audacieux et dérangeant – on songe au cinéma d’un Ulrich Seidl -, c’est là aussi un film pénétrant, le plus fort assurément que l’on ait vu en ce début de Mostra, encore qu’il fut loin d’y faire l’unanimité…

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