Critique | Musique

Beach Boys – That’s Why God Made the Radio

© Guy Webster

POP | Les Beach Boys -fondés en 1961- récupèrent le génie maison, Brian Wilson, pour un album communautaire d’un immarcescible charme solaire.

Beach Boys, That’s Why God Made the Radio, distribué par EMI. ****
www.thebeachboys.com, en concert le 7 août aux Lokerse Feesten, www.lokersefeesten.be

Non, Brian Wilson n’a pas passé deux décennies au bord de la folie dépressive, les neurones dévorés par l’alcool, la coke et les médocs. Non, Brian n’a pas subi les assauts vicieusement manipulateurs du bon docteur Landy. Non, une cascade de procès mesquins entre membres du groupe n’a pas pourri l’image chromo des enjoliveurs sixties, Mike Love est toujours un type adorable. Dennis Wilson, ne s’est pas noyé, à l’âge de 39 ans, en 1983, un soir de beuverie supplémentaire à Marina Del Rey. Carl Wilson n’a pas été emporté par un cancer du poumon, en 1998, à peine quinquagénaire. Et non, le pater-manager Murry Wilson n’était pas un salaud violent. Tout baigne pour les garçons de la plage, on est toujours en 1965 -peut-être 1966- et Brian Wilson, Mike Love, Bruce Johnston, Al Jardine et David Marks, tous nés entre 1941 et 1948, sont encore des adulescents, potes de Jan & Dean, surfeurs dilettantes, cramant leurs chansons aux ultraviolets d’une éternelle jeunesse promise.

Glorieux larynx

Retour au vrai film: voilà donc le premier album des Beach Boys avec la complète collaboration de Brian Wilson et de nouvelles chansons, en 27 ans. Connaissant les multiples désastres personnels et dissensions du groupe, cela aurait pu n’être qu’une simple trêve de merchandising musical, chausse-pied d’une lucrative tournée anniversaire qui passera cet été aux Lokerse Feesten. Ce l’est d’autant moins que le sentiment d’harmonie ne touche pas seulement aux vocaux parfaits, mais à ces 38 minutes 52 secondes de plaisir intensément collectif. Bien sûr, les voix solos ont pris un peu de grain, perdu de l’élasticité juvénile, donnant aussi une patine émotionnelle qui, dans le cas des harmonies groupées, reste extraordinaire. Si la musique était vraiment mathématique, ces voix-là, gorgées d’une mélancolie comptable des faillites du destin, toute en écume et en salinité, referaient sans peine le théorème de Pythagore à leur mode: le carré de la longueur des larynx est égale à la somme des carrés des glottes des autres côtés. Cette perfection serait vaine si elle ne se greffait pas sur douze titres qui, eux aussi, transportent cette même idée de trajet parfait, ou plutôt d’hypnose charnelle, dans les ressacs inattendus des mélodies. Brian Wilson, qui produit l’album, en est aussi le (co)compositeur principal. Et même si l’une des pièces-maîtresses du disque, That’s Why God Made The Radio, date originellement de 1998, la plupart des chansons sont contemporaines. Bien sûr, rien d’inédit sous la thématique beachboyesque: les titres l’attestent (Spring Vacation, Beaches In Mind, Pacific Coast Highway, Summer’s Gone). Mais après les invraisemblables turbulences vécues, Brian Wilson conserve une forme d’énergie et d’espoir bluffants, irradiant un formidable retour discographique. Ou tout instant semble juste et enchanteur, amenant à considérer qu’être créatif et septuagénaire est désormais tendance.

Philippe Cornet

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