Critique | Musique

The Strokes – Angles

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ROCK | Les Strokes reviennent avec un quatrième album: Angles n’en manque en effet pas, mais se passe d’un quelconque point de vue avec une nonchalance crasse. Dommage.

The Strokes, Angles . Distribué par Sony.

Les Strokes ont un problème. Toujours le même: leur premier album. Dix ans après la sortie de Is This It, le groupe semble toujours calé sur le même repère. Certes brillant, et dans son genre, l’une des premières oeuvres les plus percutantes de l’histoire du rock. Mais depuis, le groupe s’est contenté de sortir deux albums passablement bancals: Room in Fire (2003) et First Impressions of Earth (2006). La plupart auraient déjà été rangés au rayon des causes perdues, des espoirs trahis. Pas les Strokes, qui continuent encore aujourd’hui d’être attendus au tournant, préservant le bénéfice du doute.

Peut-être en remerciement des services rendus à la cause. Avec sa morgue, son perfecto, ses Converse élimées, et sa dégaine new-yorkaise, la hype autour de Is This It est l’un des derniers moments où le rock a pu paraître cool. Une hypothèse que venaient confirmer les succès fulgurants de groupes comme les Libertines ou les White Stripes, chacun dans son genre. Le truc, c’est que Is This It a beau avoir marqué une époque, il ne fait toujours que 36 minutes et 28 secondes. Un peu court pour habiller le mythe, on l’avouera….

Paresse

Dix ans plus tard, le nouveau Angles n’est pas beaucoup plus long. Mais pour la première fois, c’est l’ensemble du groupe qui est crédité à la composition des morceaux, là où d’habitude Casablancas prenait en charge le gros du boulot d’écriture. Les retrouvailles semblent cependant ne pas avoir été aussi évidentes que cela. Un premier jet réalisé avec le producteur Joe Chicarelli a été envoyé quasi intégralement à la poubelle, le groupe décidant finalement de prendre en main lui-même le disque. Jamais un bon signe.

Nick Valensi a d’ailleurs évoqué « l’enfer » qu’a été la réalisation du nouveau disque. Car au final, Angles apparaît largement boîteux. Entre le reggae de Machu Picchu et le refrain glam de Gratisfaction, on ne sait jamais trop sur quel pied danser. Non pas qu’il n’y ait pas l’une ou l’autre bonne chanson à se mettre sous la dent. A cet égard, le single Under Cover of Darkness est même plutôt réussi. Mais il n’apporte rien de neuf (« Everybody’s singing the same song for ten years », chante Casablancas. Sans blague…), symbole d’un disque plombé par une nonchalance crasse.

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Le cool des débuts passe ainsi de plus en plus pour une sorte de je-m’en-foutisme. Le rire est devenu jaune. Dans la bande, Julian Casablancas semble être le moins concerné (laissant ses camarades graver la musique, avant d’enregistrer ses vocaux seul, dans un autre studio). Malgré cela, les Strokes gardent une allure, mais qui semble tourner ici à vide. Angles sonne du coup comme un album paresseux, dégoupillant à chaque moment l’éventuelle importance qu’il aurait pu avoir.

Dans ses fameuses chroniques, Bob Dylan explique comment, fatigué, il avait tenté de se débarrasser de l’image d’icône folk, en brouillant les pistes. « J’ai sorti un album (un double), après avoir filtré n’importe quoi dans une passoire. J’y ai mis ce qui était resté au fond. Puis j’ai réfléchi, et j’ai récupéré le reste dans l’évier pour l’enregistrer aussi. » Casablancas & Co ont dû bien retenir la leçon…

Laurent Hoebrechts

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