Le chanteur des Bérurier Noir, des concerts punk au CNRS

François Guillemot, chanteur des Bérurier Noir (à gauche). © YouTube
FocusVif.be Rédaction en ligne

François Guillemot, ancien chanteur des Bérurier Noir, a abandonné ses vestes en cuir et ses rangers pour un costume plus classique d’historien au CNRS à Lyon. Il revient sur sa carrière de punk.

Au milieu des livres, dans son bureau de l’Institut d’Asie orientale (IAO) à Lyon, François Guillemot colle à l’image de l’historien au CNRS qu’il est devenu. Davantage qu’au « Fanfan » du groupe Bérurier Noir qui conquit la jeunesse punk des années 80 et mit la police en émoi.

A 50 ans, tempes grisonnantes et allure sport chic, ce père de quatre enfants, marié deux fois à des Vietnamiennes, revient sur son adolescence dans les squats parisiens. Puis la grande époque des « Bérus », leur « autodissolution » à l’Olympia fin 1989, leur reformation en 2003, et l’autre « dissolution » de 2006.

Des cas sociaux petits bourgeois

« Les Bérurier Noir sont nés sur un deuil », le 19 février 1983, lors d’un « concert hommage à l’ancien groupe des Bérurier », quitté alors par deux guitaristes, raconte ce fils d’artiste peintre, Grand prix de Rome 1964, et d’une « décoratrice coloriste ». « On était des cas sociaux, issus de milieux petits bourgeois éclatés ou de familles éclatées d’ouvriers », confie celui qui portait, jusqu’à 17 ans, une « crête décolorée à la Taxi Driver », et prenait le métro « les vêtements déchirés, avec des christs à l’envers et des lunettes noires de soudeur ».

« Sans formation musicale », Fanfan au chant et Loran à la guitare enchaînent avec le groupe les concerts festifs dans des squats ou des salles, enflammant un public de « jeunes en rupture », échauffés par l’alcool. « Il y avait un décalage entre l’image et les messages véhiculés, la musique dure et ce que nous étions », insiste François Guillemot, qui affichait déjà un « dégoût de la violence », renforcé par sa pratique du karaté depuis fin 1982.

Les Opinel et les matraques, pas pour eux

A l’époque, étudiant aux Beaux-Arts et « manutentionnaire au BHV », il arrête aussi le tabac et l’alcool après avoir vu Pierrot le guitariste en désintoxication. « On a toujours dit qu’on n’était pas un groupe violent, on mettait en scène l’énergie », martèle le chercheur, rappelant que le service d’ordre du groupe « désarmait » les jeunes de leurs « Opinel, matraques et gaz lacrymogènes ».

En 1986, « Salut à toi » marque le début de la « notoriété », qui explose en 1987 avec « L’Empereur Tomato Ketchup », « une chanson où la révolte des enfants finit en dictature ». « Il y avait une volonté d’ancrer les Béru dans un rôle de gauche inscrit dans le marbre, ça ne m’intéressait pas du tout », confie celui qui se dit « plus proche d’Amnesty International que d’une quelconque formation politique ».

« Trop de divergences »

Le chanteur pense qu’il faut « transformer les Bérus, au niveau culturel et musical » mais il y a « trop de divergences » entre eux: après 200 concerts en sept ans, le groupe « s’autodissout » lors de trois spectacles à l’Olympia, début novembre 1989.

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« Passionné par le Japon » et les « boat-people », Guillemot s’inscrit alors à Langues O, où il étudie le vietnamien, puis en 1997 à Paris VII où sa maîtrise porte sur « la résistance armée contre le régime de Hanoï après 1975 ». Des études financées par des « petits boulots » et les royalties.

Ils auraient pu être « les Daft Punk du futur »

En 2003, doctorat d’histoire en poche, alors qu’il « travaille sur un DVD historique du groupe », les Bérus se reforment aux Transmusicales de Rennes. Un retour « fracassant » devant un public « ancienne et nouvelle génération »… et des échauffourées avec la police. Trois concerts suivront lors de cette étape baptisée « déformation ». Au Québec devant 50 000 personnes, puis au Festival de musiques électroniques de Brest. Un dernier à Lillers (Pas-de-Calais) en 2005, date à laquelle il est reçu au CNRS.

« Je savais qu’en décembre, je serais en poste à l’IAO et j’ai proposé de faire de la musique underground, sans apparaître », explique l’historien, convaincu que les Bérus « auraient pu être les Daft Punk du futur ». Mais nouveau désaccord dans le groupe: Guillemot rédige en 2006 un « communiqué de dissolution ». Qui sait ? « Avec Masto le saxophoniste, on s’est toujours dit qu’on refera de la scène à 65 ans », dit-il dans un éclat de rire. Et on les attend.

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