Francofolies de Spa 2011: Raphaël

© Frédéric Pauwels

Raphaël est simplement le mec qui succède à Bashung/Christophe, perchant au patrimoine public grâce à ses tubes mais avec un sens du panache qui l’emmène loin des somnifères du succès.

Raphaël arrive en scène dans un manteau vieille Russie plus tsar que star. Attendu par des rangées de filles aux dents porcelaines et un ciel parsemé de caries. Chaud et froid, comme la critique rock confondant un peu trop les mièvreries crétines du Top 50 avec les douleurs intraveineuses de l’amour, telles que chantées par le Français né en 1975. En une poignée d’albums, Raphaël a taillé dans une matière imbriquant l’héritage de Ferré et de Bowie, y rajoutant ses propres obsessions génétiques de musiques juives, slaves, argentines, naturellement portées au spleen. Raphaël est simplement le mec qui succède à Bashung/Christophe, perchant au patrimoine public grâce à ses tubes mais avec un sens du panache qui l’emmène loin des somnifères du succès. Et c’est exactement ce que son concert spadois du samedi soir insinue, en démarrant sec sur Terminal 2B, extrait de l’album sorti en 2010: la chose crisse et hérisse sur des mélancolies chavirées par un son de rebouteux.

Le côté traficoté-organique, Raphaël le pratique à la première personne: jouant aussi du theremin -vieil instru électronique- placé devant lui. Il en sort des zouin-zouin bizarroïdes qui vont directement perforer les nuages gris de Spa. Résultat, il pleut sur ses classiques revisités, Caravane prend des couleurs flamenco et Dans 150 ans télescope un fulgurant ralenti émotionnel. Tout cela bénéficie de cinq instrumentistes brillants où l’on remarque une pianiste-violoncelliste aussi jolie que stoïque -cf. sa tenue légère eu égard au frais ambiant- et Yan Péchin aux guitares. Celui-là fout des embouteillages dans les grandes avenues a priori claires de Raphaël, consumme la pedal-steel guitar, se lâche dans des morsures six cordes qui percutent L’espace Schengen ou une monumentale version de Sur la route, l’un des trois titres du rappel. Péchin, ce ne sera pas un hasard, était le guitariste de Bashung.

Revenant finalement seul, en tee-shirt blanc montrant des séances de muscu, Raphaël fait frémir une boîte à rythmes et sa guitare acoustique (nettement amplifiée), la frôle et la brusque, sur une reprise cathartique d’Osez Joséphine d’Alain B justement. Montrant combien cette filiation, il la mérite, la transcende, la fait revivre à sa façon. On sera au concert du 14 août au Brussels Summer Festival. C’est tout dire.

Philippe Cornet

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