Arcade Fire on the dancefloor (Reflektor, en écoute intégrale)

Arcade Fire © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Reflektor, le 4e album des Canadiens, sort officiellement le 25 octobre prochain. On a déjà pu l’écouter en avant-première. Impressions à chaud à la sortie des vestiaires…

De toutes les sensations indie issues des années 2000, Arcade Fire est peut-être celui qui s’en est sorti le mieux. Le seul en tout cas à pouvoir prétendre au statut de supergroupe. En 3 albums, la courbe est restée ascendante – jusqu’à The Suburbs (2011) remportant, à la surprise générale, le Grammy du meilleur album. Et tant pis si le groupe perdait en cours de route une grande partie de l’énergie vitale qui habitait Funeral, miraculeux premier album: on ne peut apparemment pas tout avoir, le succès ET l’intensité.

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A partir de là qu’attendre d’un nouvel album des Canadiens? La mainstreamisation définitive du phénomène ou un regain de créativité susceptible de ramener de l’excitation? Voire une combinaison des deux? Une première écoute de Reflektor ce matin dans les bureaux du label a pu donner des indices. Mieux: s’il est souvent compliqué de se faire une idée d’un disque après une seule écoute, Reflektor est de ceux à imposer instantanément leur stature. Un album énorme, orgiaque, ludique et gourmand. Oui, c’est assez nouveau: Arcade Fire s’amuse. Essaie aussi des choses, multiplie les pistes. Parfois se plante aussi, mais au moins fait bouger ses lignes intérieures (il était temps).

Certains avaient vu dans The Suburbs leur Automatic for the People. Dans ce cas, Reflektor serait leur Achtung Baby!, disque du renouvellement, de l’ironie aussi, et du second degré. Les références à U2 ne manquent d’ailleurs pas. Comme les Irlandais lors de la tournée Zooropa de 93, Arcade Fire déboule aujourd’hui en portant sur la tête… leur propre masque. Dans leur récente vidéo tournée par Roman Coppola (ci-dessous), Win Butler balance d’ailleurs Bono de la scène pour prendre sa place…

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Sur un titre comme Normal Person, la batterie métallique renvoie immanquablement à The Fly. Autre indice: les paroles en abyme qui font penser au détachement dandy de Bono période Achtung baby!. Dans la foulée, Butler ne chante plus seulement de manière hargneuse, mais essaie pour le coup d’être carrément vicieux. « Do you like rock’n’roll music? » demande-t-il en intro du morceau. « Cause I don’t know if I do… »

De fait, Arcade Fire s’éloigne de l’indie rock un poil emo pour lorgner vers la piste de danse. Lâché il y a un mois et demi, le single Reflektor avait donné le ton, long morceau aux réminiscences disco, Régine Chassagne se prenant presque pour Donna Summer. De son côté, Flashbulb Eyes est un drôle de morceau space-dub-reggae, tandis que Here Comes the Night Time s’amuse régulièrement à changer de vitesse. Evidemment, la mue ne s’est pas faite toute seule. L’apport de James Murphy (LCD Soundsystem) à la production est essentiel. Capital même. En coulisses, le gourou dance-punk mène ses troupes à la baguette, dévergondant les rigidités de Butler & Cie. Sur quasi tous les morceaux, sa patte est reconnaissable: un clavier eighties, un son de batterie typique, un oscillateur au son spacy…

Arcade Fire on the dancefloor (Reflektor, en écoute intégrale)

Vendu comme un double album, Reflektor s’agite sur la première moitié avant de ralentir. Mais même avec la gueule de bois, Arcade Fire se glisse, plutôt habilement, dans le costume et les références de Murphy: les synthés vintage de It’s Never Over, la drum machine de Porno

Certes, il y a bien un souci. Le plus gros problème du disque? Sa crédibilité. Est-on prêt à voir se trémousser sur le dancefloor ceux qui chantaient encore récemment « my body is a cage »? Ou encore: si le groupe a bien chanté Haïti, peut-il pour autant se promener dans les rues de Kingston sans faire tâche? A cet égard, la patte de Murphy est tellement omniprésente, que plusieurs fois elle manque d’étouffer le groupe. Arcade Fire ne ménage pas ses efforts pour se renouveler, quitte parfois à rendre le geste un peu forcé. Mais soit. Au final, l’envergure de Reflektor, sa gourmandise et son envie, font oublier ce genre de pinaillage. Après tout, tout le monde a droit à une deuxième vie…

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