Couleur Café J3: Raggasonic, Mos Def et Calexico

Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

Dimanche. Difficile de rester à un endroit de CC, surtout lorsqu’on est curieux. Là, on entre dans le Palais du bien manger, accueilli par un bouddha, géant et repu. Un oeil posé sur l’habituel carnaval des cuisines du monde dont les prix ont tendance, eux aussi, à prendre un peu de cholestérol…

Si l’on quitte l’allée principale des échoppes, ce qui n’est pas forcément autorisé, on tombe directement dans l’arrière monde d’immenses hangars des anciennes douanes, inoccupés. Pendant plusieurs éditions, ils ont servi de parking VIP et l’on se souvient du lugubre nocturne de la chose. Des espaces vides qui bordent la bouffe, on découvre le camping, visiblement très humidifié par les pluies de vendredi. Ce qui ne l’a pas empêché d’être archi-complet à l’avance: cette partie de Bruxelles a toujours été une terre de migrations…. Sous la géante carcasse de métal: poubelles géantes, vide-chiottes, containers, caravane, il y a même un bâteau échoué sur une curieuse plage de béton. Tout cela pour dire que le backstage de labeur du festival évoque véritablement l’histoire industrielle de Bruxelles, ses mémoires, ses traces sociales. Sans vouloir psychologiser à deux sous, il est clair que Couleur Café porte dans son ADN plus qu’un site devenu mode, Tour & Taxis, mais le sens de ses échanges passés. Qu’il mixe à sa façon. Ainsi, on passe quasi en temps réel, du ragga des bien nommés Raggasonic français -rien de génial mais synchro aux naturelles vibrations Jah de l’endroit- à Mos Def puis à Calexico. Ceux-ci en scène principale Titan, semblent quand même un brin décalés avec leur tex-mex naturel projeté vers la plaine ensoleillée. Les trompettes mariachis décongèlent néanmoins l’assistance -pas très nombreuse en début de gig- et poussent ce gumbo américain à groover le plus possible. A deux mètres du batteur, on se met à absorber le pli impeccable du pantalon de bon tissu, les chaussures de cuir sorties d’un magasin new yorkais (genre) et le mécanisme poli et finaud du musicien chargé de booster la machine à rythmes. Preuve que le métissage revêt souvent diverses options. Mon respectacle collègue Laurent Hoebrechts vous en dira sans doute plus, mais en voyant une paire de morceaux de Mos Def, accompagné d’un groupe de jazz, comme lui, américain -le Robert Glasper Band- on ne peut qu’être épaté par cette union-là. Elle a tout du funk essentiel qui fit, par exemple, rentrer les Last Poets dans l’histoire de la Big Black Music. C’est dire…

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