Leigh Ledare au Wiels: entre perversité et intimité

© Leigh Ledare
FocusVif.be Rédaction en ligne

Jusqu’au 25 novembre, le Wiels accueille la première exposition individuelle de Leigh Ledare, au contenu sexuellement explicite. Connu pour les photographies de sa propre mère dans des positions subjectives, Leigh Ledare ne se résume pas à cela. Montages, collages, portraits, plus de 100 pièces nous font entrer dans l’univers du photographe.

L’exposition débute par Alma, une photographie de 90 cm de haut de sa mère nue, jambes écartées. Le photographe a donné cette photo et des pastels à l’huile à un enfant de trois ans qui a gribouillé dessus. Il explique que l’oeuvre témoigne du parallèle entre le point de vue innocent de l’enfant, qui est trop jeune pour interpréter la pose lascive de la mère, et celui plus perverti de l’adulte. Leigh Ledare est tel qu’il apparait sur ses photos. Grand, mince, moustachu. Il explique les différentes séries de photos qui sont exposées, d’une voix douce, presque inaudible, concurrencée par le son des vidéos où apparait sa mère. « Mom » comme il l’appelle est la pièce centrale de l’oeuvre de Leigh Ledare.

L’omniprésence de la mère

C’est elle qui figure sur la série de photo qui l’a rendu célèbre: Pretend You’re Actually Alive. Etendue sur une période de huit ans, cette séquence présente à la fois des photos de Tina Peterson, mère de l’artiste, dans son intimité, prenant du plaisir seule ou accompagnée, mais aussi des notes tapées à la machine à écrire, des pages de magazines, des souvenirs. Interrogé sur le choix de la mère pour réaliser ses photographies, Leigh Ledare explique: « C’est ma mère qui m’a demandé de la photographier. Elle voulait voir comment elle apparaissait dans le cadre d’un appareil photo. » C’est cela qui rend le travail de Leigh Ledare si singulier. Ce qui retient l’attention, c’est cette relation étrange qui s’est établie entre celle qui, dans l’imaginaire collectif représente la maternité et qui ici, pour son fils, s’offre totalement à son regard et, par l’intermédiaire de l’objectif photo, à ceux d’inconnus.

Leigh Ledare et sa mère, la première qu’il a photographié après sa formation © Leigh Ledare

Toutes les photographies ne revêtent pas un caractère à la limite de la pornographie: certaines sont touchantes, tristes, gaies. Si parfois le spectateur se sent gênés, voire mal à l’aise devant des scènes aussi crues, il ne peut renier la qualité des photographies de l’artiste. Le cadrage, la couleur et la lumière sont idéalement associés pour que les oeuvres du photographe dépassent rapidement l’étape du simple voyeurisme et deviennent une véritable étude de ce que peut relever l’objectif d’un appareil photographique sur les relations humaines.

Les autres

L’ex-femme de Leigh Ledare, Meghan Ledare-Fedderly, pose également sur de multiples photographies, qui constituent le projet Double Bind. Dans cette série, Leigh Ledare a passé trois jours dans la forêt en compagnie de son ex-épouse à la photographier, puis il a demandé au nouveau mari de celle-ci de faire de même. L’artiste a ensuite développé les photographies prises par les deux hommes. Sur les clichés, au contour noir pour celles prises par Leigh Ledare et blanc pour celles de Adam Fedderly, Meghan apparait tantôt aimante et chaleureuse, tantôt farouche et effrontée. Les clichés montrent que la photographie permet de témoigner des relations entre individus. Et Leigh Ledare s’intéresse à tous types de relations. Pour la série Personnal Commissions, réalisée en 2008, il répond à des annonces de femmes au foyer recherchant des relations sexuelles tarifées. Il leur demande de l’habiller comme elles le souhaitent puis de le prendre en photo. Mais les femmes ne sont pas les seules personnes à captiver le photographe. Sur les photos exposées, on retrouve les relations de l’artiste avec les autres, amis, parents, inconnus… Par exemple, un de ses assistants, qui n’est autre que le sulfureux Larry Clark, l’a lui-même pris en photo.

Leigh Ledare pris en photo par une de ces femmes qui postaient des annonces érotiques © Leigh Ledare

Actuellement, Leigh Ledare mène un projet appelé Collector’s Commissions, qui consiste à demander à des collectionneurs de le photographier, au milieu d’objets de leur choix. Le photographe apparait alors dans les mêmes positions que celles dans lesquelles sa mère apparaissait, au centre de l’objectif.

Leslie Meuraillon (stg)

Leigh Ledare et al. Jusqu’au 25 novembre au Wiels
354, avenue Van Volxem – Forest
8€ – 5€ pour les étudiants et les séniors

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content