[Critique théâtre] Danser sur le ring, volet 2

(B) de Koen Augustijnen et Rosalba Torres Guerrero © Danny Willems
Estelle Spoto
Estelle Spoto Journaliste

Le duo de chorégraphe Koen Augustijnen et Rosalba Torres Guerrero interroge la boxe dans ses différentes facettes. La violence côtoie la beauté du geste, l’agressivité frôle l’érotisme.

Hasard des calendriers, deux spectacles de danse prenant la boxe pour centre se côtoyaient récemment sur les scènes belges. Après Boxe Boxe Brasil du chorégraphe français Mourad Merzouki, c’était au tour de Koen Augustijnen et Rosalba Torres Guerrero de livrer leur vision de ce sport dans (B), créé ce week-end aux Ecuries de Charleroi après une résidence de plusieurs semaines.

Ce qui frappe d’emblée dans l’approche adoptée ici, c’est l’hétérogénéité des interprètes. Là où Merzouki optait pour un groupe de danseurs brésiliens aux carrures similaires, la paire de (B) réunit des danseurs ET de vrais boxeurs, des hommes ET des femmes, d’origines et d’âges divers. On apprécie que les gants ne soient pas réservés à la gent masculine, laissant au sexe « faible » la possibilité d’affirmer largement sa combativité. On apprécie aussi les contrastes qu’offre ce panel bigarré, notamment dans le duo de séduction entre Alka Matewa, champion de muay-thaï originaire de Kinshasa, et la danseuse sicilienne Giulia Piana, comme une version black and white de Rocky et Adrian, mais qui évolueraient ensemble sur le ring.

Autre différence: alors que Boxe Boxe Brasil s’impose comme un hommage emportant par sa joie et son énergie, (B) s’affiche plutôt comme une interrogation. Qu’est-ce que les spectateurs attendent exactement d’un match? Qu’est-ce qui pousse deux hommes à monter sur un ring pour se cogner? Où se situe la frontière entre l’hostilité et l’attraction, entre l’érotisme et le danger? (B) n’est pas une déclaration d’amour à la boxe, mais une suite tableaux-métaphores convoquant non seulement les gestes des boxeurs, mais tout l’univers déployé dans le carré de cordes, ce qui l’entoure et le précède. Le sang, le seau et l’éponge sont revus dans un ralenti en mode human beatbox, on se refile la chemise blanche de l’arbitre au rythme du générique du Benny Hill Show, les cordes à sauter de l’entraînement font siffler l’air en choeur et l’on se joue des pin-up qui défilent en talons hauts pour annoncer le numéro du round. Le tout en dialogue avec un écran vidéo trônant en fond de scène et où défilent des séquences ultra léchées en noir et blanc. Si certains passages captivent (surtout quand la musique se fait live, par le chant ou les percussions corporelles), d’autres laissent à quai. Qui dit interrogation dit distance et l’on reste ici sans doute trop loin. Ce qui n’enlève rien au mérite des talents rassemblés.

(B), les 6 et 7 février au Grand Théâtre de Luxembourg, le 9 février au théâtre Le Manège à Mons, du 1er au 3 mars au Vooruit à Gand, le 7 mars au CC Westrand à Dilbeek, le 9 mars au CC Ter Dilft à Bornem, le 26 avril à De Warande, à Turnhout.

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