Vendredi, Rap’à’Nuit

Ca commence vendredi, vers minuit. Au Nexx, joli disco-bar un peu maudit des environs de Flagey.

Dans le sas, entre le portier et le caissier: « Je suis journaliste, j’inaugure une chronique sur la nuit bruxelloise, ça paraîtra toutes les semaines sur le site de Focus ». Envie d’entrer en prince quoi… »C’est hip hop ce soir, vous savez? » OK, j’ai pas l’air hip hop. C’est la mèche?

Peu importe, inside, c’est Simon Le Saint aux plaques, l’un des DJ les plus polyvalents de la place. Un petit gars (en taille) capable de taper du pointu et du old school (merci pour ce bon vieux Eric B & Rakim) tout en vendant, quand il faut remplir le frigidaire, son âme au chéquier (voir ses prestations house commercial au Spirito Martini). A ses côtés, le rappeur animal Uman, figure ancestrale du hip hop bruxellois, annonce de sa voix qui fait peur l’arrivée imminente d’une star américaine. Et oui, c’est soirée exceptionnelle au Nexx: Simon chauffe la place pour Pete Rock, légende yankee de la production hip hop à ne surtout pas confondre avec Peter Rock, le Johnny Hallyday chilien (quoi, mes références, qu’eeeeeeest-ce qu’elles ont mes références ?).

Hé ben franchement: malgré les 83° à l’ombre, rideaux tirés, deux litres de sueur partis faire leur vie, j’ai bien envie que Le Saint continue à tourner le manège avec du Tupac. Les boogies des filles et les baggys des mecs ont l’air aussi remués que moi (et mon anti-style hip hop) mais vers 1h15, Pete Rock débarque bel et bien dans le DJ booth. Et passe à la chaîne deux jeunes promesses du funk américain, James Brown et Michael Jackson. Y’a plus complexe pour se mettre une salle en poche. Et plus audacieux aussi. Mais la sauce, déjà bien assaisonnée par Le Saint, prend sans aucun souci. Le lendemain, une nana confirmera: « J’aurais préféré que Simon continue ». Time to go.

Direction le Wood où So’Lex, l’un des poulains de l’écurie Libertine, squatte l’affiche des Vendredis Nancy. Le Wood, nouvelle place to be du bois de la Cambre, n’est autre que le dernier joujou en dur de Carl de Moncharline, qui est à la nuit bruxelloise ce que le chou est à la choucroute.

Chaud à l’intérieur, Alex So’Lex calibre ses titres electro à la manière K-Nal et la terrasse, pour moi, est un échec cuisant: mes tentatives de drague se fracassent lamentablement sur l’indifférente carapace de la gente féminine. Même pas mal. Mais bon, il est 3.00 et j’ai l’ego qui pleure, comme le téléphone à CloClo. Deux adjuvants: manger et/ou draguer plus jeune.

Bingo, sur la route de Memphis (ou plutôt de Louise), y’a un Quick et un Louise Gallery: manger au Quick, draguer au Louise, ou l’inverse. Trois ‘tites meufs s’extirpent de l’ex boîte à la mode avec les chaussons tout souillés: non, ma caisse tunée qui déchire ne s’est pas transformée en De Lorean, on fait toujours des soirées mousse en 2010… L’appel de l’ignoble Giant prend donc largement la mesure de la sauterie mousseuse.

Au final, après un dernier détour désespéré par le You et sa soupe électro pour super-djeunzs à chemise (si djeunzs d’ailleurs qu’en cas de bagarre, les mecs perdent souvent leur dents de lait), il est temps de laisser mon corps trier le sang et la vodka, à l’horizontale.

Samedi, c’est Strictly

Samedi, c’est différent. Parce que ça commence plus tôt. Et en plein air. Deux grosses centaines de curieux sont réunis sur les marches du Mont des Arts, obligeant les skaters à délaisser leur spot préféré pour aller jouer au bridge. L’initiative est plutôt dans l’air du temps : le DJ/producteur Compuphonic et son label (qui monte qui monte) Union Match s’occupent des beats pour l’Apero BD, en pleine fête bruxelloise du Neuvième Art. De quoi donner aux artistes occupés à « live painter » des fourmis dans les fresques.

Maxime Firket, aka Compuphonic, a l’air un peu seul, surélevé sous son petit chapiteau rouge, mais son set donne envie de sautiller. Il est 21h30 et une femme étrange s’essaie au jumpstyle flamand avec un petit chien fripé dans les bras, lequel demande à rentrer chez lui sur le champ. Place de l’Albertine, le stand du « Couscous de Tintin au Pays de l’Or noir » a bien moins de succès que l’éternel chapito-mojito. C’est écrit dans les étoiles: un jour, ceux qui n’aimeront pas les mojitos deviendront les nouveaux parias de la société.

Parlant de parias: petit détour aux Jeux d’Hiver un peu plus tard dans la soirée, contraint et forcé par mes amis (super excuse, un peu comme quand on connaît Le Roi Lion par coeur, parce que sa petite soeur regarde tout le temps, genre). Stinget Police dans les baffles, de la bonne bouillabaisse uccloise autour des bars et faut être honnête, les Jeux, c’est quand même un joli endroit bien propre sur lui. Rien de transcendant à signaler aux Games, à part 62 enterrements de vie de jeunes filles et un black perdu dans la mélasse WASP ou apparentée de ce temple bourgeois. Quand je me mets à shaker mon booty sur l’abominable Waka Waka de Shakira, je comprends qu’il est temps de partir ou de placer mon crâne dans la machine à croque-monsieur (qui nous sauvera de la famine, quelques heures plus tard)…

Deux euros cinquante au portier et direction l’Axess, niché dans le superbe Entrepôt royal de Tour & Taxis. Soirée en plein air là aussi, merci Tatiana « Miss météo » Silva d’avoir accordé 12 heures sans pluie à notre bonne vieille capitale. D’entrée, on sent que le Spirito Martini garde portes closes pour le moment, puisque la clientèle du plus grand parc à bling-bling d’Ixelles semble s’être rabattue tout entière sur cet élégant resto-club. Au menu, house de magasin dans les meilleurs moments (David Guetta, si tu nous lis, pourrais-tu te lancer dans la fabrication de bières d’abbaye et arrêter la musique?), C’est chaud ça brûle de Magic System dans les moments plus compliqués et un véritable brassage ethnique, du blanc et du coloré en même proportion, ce qui se fait rare dans nos contrées.

L’ethnie n’a rien à y voir mais un peu plus tard à Molenbeek, les filles font toutes 10 centimètres de moins. Parce que le haut talon n’est pas de rigueur à la Strictly Niceness et que les auréoles sous certains bras ont la taille d’un pays. Mais on s’en fout: à la Strictly, soirée funky mitonnée depuis un paquet d’années par DJ Kwak et Bernard Dobbeleer, on s’éclate à l’ancienne, en dansant sur des sons chauds, en mouillant le maillot sur du garage anglais, du caribbean ou du bon vieux funk crasseux. A la Strictly, on peut même croiser des mecs avec des tee-shirts Levis. Carrément.

Bon, il est 4h30, dans ces eaux-là, le moment d’aller voir au K-Nal si la soirée du label allemand Kompakt fait le plein. Affirmatif. Jolie recette pour le taulier Cosy Mozzy, toute barbe dehors, et ça tabasse bien comme il faut dans la cabane de l’avenue du Port. Ca sue pas mal aussi dans l’un des derniers vrais clubs de Bruxelles, mais mes souliers de rock’n’roll ne sont pas adaptés au 100 BPM. Bougeotte, encore. Pour terminer lamentablement dans le pot à ketchup du meilleur snack de la ville (à cette heure-là): les Jeux et leurs canonissimes croque-monsieur. Rideau.

Guillermo Guiz

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