Prix Nobel: Dylan a remis in extremis un discours « extraordinaire » et « éloquent »

Bob Dylan, 2009. © GETTY IMAGES/Frazer Harrison
FocusVif.be Rédaction en ligne

Lauréat parmi les plus facétieux de l’histoire des Nobel, Bob Dylan a transmis in extremis le traditionnel discours exigé pour recevoir l’argent du prix de littérature (800.000 euros), texte dans lequel il esquisse une poétique de la chanson en convoquant Homère et Moby Dick.

« Le discours est extraordinaire et, comme l’on pouvait s’y attendre, éloquent. Le discours transmis, l’aventure Dylan s’approche de sa conclusion », a commenté, soulagée, la secrétaire perpétuelle de l’Académie suédoise, Sara Danius, sur son blog.

Dylan, 75 ans, disposait de six mois pour transmettre son discours à compter de la cérémonie de remise du Nobel qui se tient chaque année le 10 décembre à Stockholm à la mémoire d’Alfred Nobel, inventeur de la dynamite et créateur des prix portant son nom.

Samedi à minuit (22H00 GMT), le pactole de 8 millions de couronnes (819.000 euros, 923.000 dollars) lui aurait échappé et serait reparti dans les coffres de la Fondation Nobel. Mais le chanteur a bien remis à temps un discours audio, publié sur le site de l’Académie suédoise, dans lequel il justifie d’avoir joué si longtemps à cache-cash avec les sages suédois.

« Quand j’ai reçu le prix Nobel de littérature, je me suis demandé quel était précisément le lien entre mes chansons et la littérature. Je voulais y réfléchir et découvrir la connexion », a plaidé l’auteur-compositeur, de son vrai nom Robert Allen Zimmerman.

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Il cite successivement au nombre de ses inspirateurs Cervantès, Herman Melville ou encore William Shakespeare, et reconnaît puiser aux sources multiples de l’art à travers les siècles, de Homère à Buddy Holly.

« J’ai appris tout ça à l’école primaire. Don Quichotte, Ivanhoë, Robinson Crusoë, les voyages de Gulliver, Le conte de deux cités, et tout le reste (…). Je me suis servi de tout ça quand j’ai commencé à écrire des textes pour chansons », dit-il.

Parmi ses oeuvres de référence, Bob Dylan distingue particulièrement Moby Dick, A l’est rien de nouveau et L’Odyssée dont il fait un savant commentaire de texte, mais comme pour mieux s’en distancier et défendre la sensation contre la théorie, le coeur contre l’esprit.

« Si une chanson vous émeut, c’est tout ce qui compte. Je n’ai pas besoin de savoir ce qu’une chanson veut dire », à telle enseigne que « les chansons, contrairement à la littérature sont destinées à être chantées et non pas lues », avance-t-il.

Un lauréat facétieux

À la surprise générale, Dylan avait été récompensé en octobre par l’Académie suédoise « pour avoir créé dans le cadre de la grande tradition de la musique américaine de nouveaux modes d’expression poétique ».

Son nom, comme celui du Canadien Leonard Cohen, décédé en novembre, revenait de temps en temps dans les spéculations, sans jamais être pris au sérieux.

Face aux critiques qui attendaient ses compatriotes Philip Roth ou Don DeLillo, la secrétaire perpétuelle a âprement défendu son choix et celui de ses pairs, inscrivant la poésie chantée de Dylan dans la tradition homérienne.

Leur enthousiasme semble n’avoir nullement été entamé par les facéties du lauréat qui avait d’abord accueilli sa récompense par un long silence, et n’avait réagi que deux semaines après l’annonce.

Dylan n’a pas non plus participé à la cérémonie de décembre à l’hôtel de ville de Stockholm, et a attendu avril pour venir chercher sa médaille et son diplôme. Le suspense restait depuis entier sur la remise de son discours ou « leçon » Nobel avant la date limite du 10 juin.

Les statuts Nobel font obligation aux lauréats du prix de Littérature d’honorer les académiciens suédois en donnant lecture d’un texte. Le récipiendaire a cependant le choix des armes: il peut chanter, danser, peindre, se rendre à Stockholm ou rester chez lui, envoyer un courrier, un enregistrement audio ou vidéo, etc.

Maria Schottenius, critique littéraire du grand quotidien Dagens Nyheter, prédit, auprès de l’AFP, que « l’Académie suédoise réfléchira à deux fois à l’avenir avant de donner le prix à des stars du rock ».

« Sans avoir à regretter le choix de Bob Dylan (…) on peut dire qu’il a causé pas mal de tracas » à ses bienfaiteurs.

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