Nos albums de la semaine: Eric Clapton, Neil Young, Roísín Murphy…

Eric Clapton © PG
Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

Clapton signe un album seyant de reprises et un triple live alors que Young en concert joue son éternelle diatribe remontée. Blues, guitares et vieilles dentelles. On parle également, dans cet article, des albums de Roísín Murphy, Vivien Goldman et Sugar Candy Mountain.

Eric Clapton / Neil Young

ERIC CLAPTON, I STILL DO, DISTRIBUÉ PAR UNIVERSAL. ****

ERIC CLAPTON AND GUESTS, TRIPLE CD CROSSROADS REVISITED: SELECTIONS FROM THE CROSSROADS GUITAR FESTIVALS. DISTRIBUÉ PAR WARNER. ***(*)

NEIL YOUNG + PROMISE OF THE REAL, DOUBLE CD EARTH. DISTRIBUÉ PAR WARNER. ***(*)

Sous laid-back consensuel, l’ex-Dieu des sixties pratique -en studio tout au moins- le pépère blues depuis environ quatre décennies. Laissant la combustion de Cream ou Derek & The Dominos en lointain sillon mirifique peu abreuvé. Sans être transgressif ou supersonique, ce 23e disque solo d’Eric Clapton ramène un bon os bluesy sans trop de graisse autour. Les reprises déterrent les morts (Leroy Carr, Skip James, Robert Johnson, J.J. Cale) sans sonner comme une amulette du Mississippi ancien. N’empêche, dans ces versions-là, les deux originaux signés Clapton ou l’interprétation d’un Dylan de 1967, Eric retrouve la niaque et parfois aussi la guitare idéalement rauque d’autrefois (Stones in My Passway). Grâce illuminée où la patte du producteur anglais Glyn Johns -légendaire pour ses travaux avec les Who, les Stones ou Led Zep- conjugue la musique à son meilleur, teintes gospel incluses (I Will Be There et I’ll Be Alright). Plus inégal, plus électrique, le triple Crossroads compile 40 titres du festival organisé à cinq reprises depuis 1999 par Clapton, ex-junkie-alcoolo, en soutien à un centre de detox de l’île d’Antigua. Dieu ne joue que sur une quinzaine de chansons, ranimant ici et là les crucifixions anciennes et ce plaisir qu’on dit charnel (Layla, Presence of the Lord). Invitant entre autres Jeff Beck, ZZ Top, Robert Cray, J.J. Cale, B.B. King et même Booker T à des bacchanales de guitares qui useront prématurément les fans d’accordéon.

Fusillades et rugissements

Sur son double live, Neil Young entoure ses morceaux de klaxons, moteurs, fusillades, caquètements, rugissements, croassements. Geste pas indispensable à la compréhension de la thèse environnementaliste d’Earth. Young y ponctionne treize titres de son large répertoire, dont quatre de son album écolo de 2015, The Monsanto Years. Les accompagnateurs de Promise of the Real, groupe du fils de Willie Nelson, font office de Crazy Horse version jeune. Sans renouer intégralement avec les larsens et autres collages orgiaques du live de 1991 (Weld),le septuagénaire canadien ne concède pas grand-chose de la force tellurique de sa musique, que ce soit la rêverie d’After the Gold Rush, l’âpreté de Vampire Blues ou le final de 28 minutes de Love and Only Love, gavé d’une rage épileptique qui ne semble jamais vouloir abandonner le front. Mantra d’un type qui, de toute évidence, refuse de vieillir tranquillement. (Ph.C.)

Roísín Murphy – Take Her Up to Monto

POP. DISTRIBUÉ PAR PIAS. ***(*)

L’an dernier, Róisín Murphy (ex-Moloko) sortait Hairless Toys, premier album en huit ans, qui fit assez forte impression pour être repris dans la liste des nominés pour le fameux Mercury Prize. Quelques mois à peine plus tard, l’Irlandaise est déjà de retour. Issu des mêmes sessions que son prédécesseur, Take Her Up to Monto suit sans surprise une ligne quasi identique: électronique, post-dancefloor, quasi fantomatique (Nervous Sleep). Volontiers biscornue aussi, peut-être davantage encore qu’Hairless Toys. À égale distance entre la séduction et la défiance expérimentale, Murphy triture, déconstruit, proposant quelque chose comme une pop adulte -et cela sans que ce soit synonyme de plans pépères. (L.H.)

Vivien Goldman – Resolutionary

ROCK. DISTRIBUÉ PAR STAUBGOLD. ***(*)

Journaliste et auteure britannique, Goldman a signé la première bio de Bob Marley, écrit des chansons pour Massive Attack et Coldcut ou encore été prof de punk et de reggae à l’unif de New York. Elle a aussi mené sa propre carrière solo entre 1979 et 1982, eu un duo new wave à Paris avec la chanteuse Eve Blouin (Chantage) et appartenu aux Flying Lizards. C’est cette période où elle fricotait avec John Lydon, les Raincoats et Robert Wyatt que résume cette compil. L’occasion de re(découvrir) ce bout de femme, samplé par les Roots et Madlib, qui a commencé en chantant avec Neneh Cherry et Ari Up sur des prods d’Adrian Sherwood. Du post-punk et de la no wave qui aiment la Jamaïque. (J.B.)

Sugar Candy Mountain – 666

POP. DISTRIBUÉ PAR JOYFUL NOISE/KONKURRENT. ***(*)

Ça sent les pieds dans le sable, la crème solaire, les cocktails au bord de la piscine… Emmené par Ash Reiter et Will Halsey (The Blank Tapes), Sugar Candy Mountain a fait produire son troisième album 666 par le leader de Papercuts Jason Quever. Beach House, Mazzy Star, Jacco Gardner, les années 60, Ducktails, la pop psychédélique californienne mais aussi des choses plus écartées de son univers comme des relents vocaux de Cristina Martinez (Boss Hog vient pour la petite histoire de sortir un nouvel EP)… Cet album rêveur et lumineux a la douceur des meilleures sucreries. Si c’est à 666 que ressemble l’enfer, on signe tout de suite et des deux mains. (J.B.)

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