Critique | Musique

Lee Ranaldo – Between the Times and the Tides

ROCK | Le guitariste de Sonic Youth revient avec une jolie chose aux confins du psychédélisme, aire de charme et de repos à l’écart du post-noisy de son groupe favori…

LEE RANALDO, BETWEEN THE TIMES AND THE TIDES, DISTRIBUÉ PAR V2. ***
Écouter l’album sur Spotify.

Lee est né en 1956, à Long Island, ce qui lui fait treize ans en 1969, année de Woodstock et d’Altamont, année de fort psychédélisme parcourant le rock américain. C’est la première impression laissée par l’album: il aurait pu être enregistré à la fin des années 60 à Big Pink, la maison du Band au nord de New York, ou aux Bearsville Studios d’Albert Grossman, manager monomaniaque de Dylan, ouverts en 1969, toujours à Woodstock. Voire même à Haight Asbury, là où le Grateful Dead refaisait le monde sous acide. En réalité, l’opération a été bouclée dans le décor moins champêtre de Hoboken, New Jersey, après que Ranaldo a donné en mai 2010 une performance acoustique au Midi Festival d’Hyères, dans le sud de la France. Il est donc parti sur cette idée de dérive peu électrique, mûrie au soleil et aux désirs d’instantanéité. Bien sûr, en route, le unplugged s’est vite fait remonter le voltage par une électricité qu’on qualifierait de naturelle vu le CV de Ranaldo au sein de Sonic Youth depuis 30 ans. D’ailleurs, l’entame du premier morceau se fait par des accords similaires à ceux des Stones de Paint It Black, titre de 1966 où le groupe anglais jouait avec ces déformations ondulantes qualifiées de « psychédéliques ». Tout de suite après ce clin d’oeil temporel (?), Ranaldo & Co inscrivent des structures de guitares qui renvoient aux moments les moins carnassiers de Sonic Youth. Les plus fluides, donc les plus pacifiques.

Son adolescent

Il en va ainsi de la plupart des plages du disque, qui semblent planer au-dessus de leur propre âme, fameuse impression de ceux qui se sont vus mourir. Vu l’état actuel de Sonic Youth -la séparation du couple Moore/Gordon pose la question de la suite des événements-, on le prendra comme une métaphore. Le procédé musical est d’autant plus agréable que ces injections d’hypnose déroulent un son clair, presqu’adolescent, parfois charnu mais qui, contrairement à la plupart des productions rock actuelles, ne semble pas avoir été artificiellement gonflé en studio par des opérateurs numériques. Tout cela resterait du plaisir fantasmé si les chansons ne semblaient concises et découpées, pour la plupart accrocheuses. Lee a visiblement travaillé le soubassement des mélodies, ce qui n’est pas toujours la priorité de son sonique groupe: des titres tels que Xtina As I Know Her ou Fire Island ont la bonté de bien vouloir s’insinuer rapidement dans l’oreille avec une grâce quasi radiophonique. Alors, toutes ces vapeurs émanant des sixties (Lost), sous abris acoustiques (Hammer Blows, Stranded), portées par l’orgue gras de cathédrales (Angles) ou les guitares christiques (Tomorrow Never Comes) dessinent un moment agréable de 47 minutes 38 secondes. Ni plus ni moins.

Philippe Cornet

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