Leaf House, de Liège à Ibiza

Leaf House © Olivier Donnet
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Signés chez Jaune Orange, l’organisateur du Micro Festival, biberonné à Animal Collective mais pas que, Leaf House enchaîne les gros festivals d’été. Petit périple sous le soleil liégeois et la pluie d’Ibiza.

Liège. L’heure de l’apéro. Un vendredi d’Ardentes. Les membres de Leaf House ont fixé rendez-vous au Cupper Café, leur QG. Un petit bar associatif qui fait galerie d’art où on écoute du Odd Future et boit de la Westvleteren. Une bière de moines qu’on ne peut aller chercher à l’Abbaye de Saint-Sixte qu’en annonçant sa venue, son identité et sa plaque minéralogique. « Si tu oublies tes papiers ou utilises une autre bagnole, ils ne te laissent pas entrer, raconte Romain. Normalement, on ne peut en acheter qu’un bac tous les deux mois. Elle se trouve juste en grande surface quand les religieux doivent financer la rénovation de leur toit… »

Romain, c’est le chanteur de Leaf House. Romain Cupper. Comme le café que son père (qui gère le lieu) et sa belle-mère (qui fait à bouffer) ont ouvert à leur pension pour avoir un endroit où se retrouver, exposer les oeuvres de leurs potes et boire des bières pas chères. Tous les membres du groupe y travaillent ou y ont travaillé un jour. Diplômés en design industriel, ils en ont même fabriqué le bar. Dessiné la déco. Y ont organisé des DJ sets et des petits concerts.

« L’antiquaire d’à côté nous loue parfois son espace. Elle déplace ses meubles. Ça ressemble un peu à des concerts à emporter. Sympa et intimiste. On a fait Sean Nicolas Savage, le batteur de Crystal Castles, pas mal de rock allemand et français aussi. »

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Après les Nuits Botanique, les Ardentes et Dour, Leaf House défendra bientôt son nouvel album au BSF et au Bucolique Ferrières. Un disque qu’il a conçu à Ibiza. « Mon grand-père allait beaucoup là-bas à la fin des années 60. Ce n’était pas du tout un libertaire. Plutôt un vieux rapia qui avait découvert une destination pas chère et encore méconnue de vacances. Il n’était pas le moins du monde soixante-huitard. Aujourd’hui, mes cousins, mes oncles, tout le monde vit là-bas. J’y vais régulièrement en vacances depuis que je suis tout petit. J’ai déjà testé quelques boîtes bien sûr mais je ne suis pas du tout un jet-setteur. »

Les Liégeois sont partis travailler dans le nord. Coin à la fois sauvage et rural du paradis des clubbeurs. « On a eu la maison de la maman de Romain gratos en échange de quelques petits services sur place, expliquent ses potes. On a géré ça la première semaine et puis on s’est consacrés entièrement à la musique. Ça nous a coupés comme on le voulait de nos potes et de nos petites amies. On se faisait juste plaisir le soir en allant se taper sur la plage avec une bouteille. »

« De toute façon, rebondit Romain, c’était hors saison. Il a beaucoup plu et toutes les boîtes étaient fermées. On est partis en camionnette pour pouvoir transporter notre matos et on a pris le ferry. Une fameuse expédition. »

Les portes de la perception

Comme pas mal d’autres groupes avant, pendant, et même après eux, les Liégeois de Leaf House sont des rejetons d’Animal Collective. Des fans de la bande à Panda Bear. « J’avais seize ans, se souvient Romain. J’écoutais du Slipknot, du Linkin Park. J’avais Deftones écrit au Tipp-Ex sur mon plumier. J’ai acheté un Guitar Mag et sur la compilation qui allait avec, j’ai découvert le morceau Leaf House d’Animal Collective. J’ai vraiment halluciné. Ce titre m’a ouvert à de nouveaux horizons musicaux. Après, il y a eu Caribou, Casiokids et tous les autres. »

« Animal Collective incarne le renouveau psychédélique, résument-ils d’une voix. Il a puisé dans le vieux pour en faire du neuf. A vraiment intégré l’expérimentation sonore dans sa musique. Il a ouvert des portes à beaucoup d’artistes. »

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Leaf House a plutôt bien assimilé ce vent de liberté, ce sens de la découverte et ce goût de la couleur… Quand ils ne samplent pas des bris d’allumettes, des bruits de briquet et de sachets en plastique qu’on triture –« ça a amené des sonorités très électro »-, les Liégeois enregistrent dans différentes pièces de leur maison ibizienne. Vont jusqu’à s’installer sur le toit. « Nous commençons souvent de manière anarchique. Nous ne débutons jamais en nous disant que nous voulons un album de telle couleur en utilisant tel ou tel instrument. Nous travaillons à l’instinct. Nous écoutons autant du hip hop que de l’électro. Du Kendrick Lamar que du Beach House ou du Jon Hopkins. »

Robert Waseige et les Talibans

Leaf House est revenu des Baléares avec 17 titres dans ses valises. Sur recommandation de Jaune Orange, il a repointé le nez à la fenêtre avec un EP plus rock et s’est donné un an pour le disque. « Ce qui nous a au départ un petit peu fait râler mais au final nous a permis de peaufiner. Quand tu enregistres en studio et que tu n’as pas beaucoup de budget, tu te retrouves souvent à ne pas pouvoir travailler tes chansons jusque dans leurs moindres recoins… »

Pour la petite histoire, été de Mondial oblige, le beau-père d’Antoine, le claviériste, n’est autre que Fred Waseige, fils de Robert et commentateur qui, de son humour à froid, a un petit peu pimenté la Coupe du monde de la RTBF. L’ancien sélectionneur national n’a jamais assisté à l’un de leurs concerts. « Je lui ai filé le CD, mais je ne sais pas s’il l’a écouté… Fred par contre a une vraie culture musicale. Il est rock’n’roll. Et musicien d’ailleurs. Il nous a notamment déjà prêté sa batterie, notamment pour un clip qu’on n’a jamais sorti tellement il était pourave. »

« Quand on s’est mis à jouer ensemble avec Toto, raconte Romain, il est venu me trouver et m’a dit: « Si un jour Antoine prend de la drogue, je te casse la gueule. »« 

Le sens de l’humour un peu décalé: une vertu que Leaf House partage avec lui malgré son image cérébrale et les galères du statut d’artiste. « Une partie du groupe est au chômage. Certains ont travaillé. Retravailleront j’espère. Antoine a repris des études. Et Titi, notre métronome, fait pilote d’avion. Il a son permis théorique et passe le pratique bientôt. On le soupçonne d’être un Taliban. »

  • LLEEAAFFHHOOUUSSEE, DISTRIBUÉ PAR JAUNE ORANGE. ***
  • Le 15/08 au BSF et le 23/08 au Bucolique Ferrières.

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