La classe DC Salas

DC Salas: "Ma première grosse claque: Homework de Daft Punk. J'avais neuf ans." © Maurine Toussaint
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Omniprésent sur la scène bruxelloise, le DJ/producteur DC Salas sort The Unspoken. Un premier album house long en bouche, à la fois sombre et mélodieux.

Fin de journée ensoleillée sur Flagey, Ixelles. Sur la terrasse bondée du paquebot Belga, les transats ont été pris d’assaut. À l’autre bout de la place, DC Salas a fui l’agitation. « Ce sera plus calme pour causer. » La veille, on lui a envoyé notre demande d’interview, via le Net. « Réponse moyenne: quelques minutes », avait indiqué le réseau social. Ça n’a en effet pas traîné. Question d’impératif professionnel: la journée, Diego Cortez Salas bosse comme « social media strategist » dans une agence de com’ digitale. Très vite, on devine que le réflexe est aussi une nécessité personnelle, pour celui qui aime multiplier les projets -DJ, producteur, patron de label, chroniqueur radio, etc.

Quitte à faire parfois craquer les coutures de l’agenda. Et éventuellement distendre les relations? Il y a un peu plus de deux ans, son couple explosait, le laissant groggy. La musique viendra à la rescousse. « Pour moi, elle a toujours été thérapeutique. » C’est ainsi qu’est né l’album The Unspoken, qui sort cette semaine. Le premier d’un parcours qui a commencé il y a un moment déjà…

En 2010, l’EP intitulé Peru signait ses débuts house cotonneux. Le disque évoquait en outre ses racines. Né en 1988, Diego est le fils unique d’une mère belge et d’un père péruvien. C’est à lui qu’il doit notamment sa passion pour les Beatles –« ces trois dernières années, j’ai dû voir trois fois McCartney en live. Et quand je peux jouer Lucy in the Sky with Diamonds en fin de set, je le fais »– et pour la musique en général. « Quand ma mère était enceinte, mon père posait le casque sur son ventre! » À la maison passent pas mal de bossa brésilienne et de musique afro-péruvienne. « Toute la famille de mon père est au Pérou. Donc je connais bien le pays, sa culture gastronomique notamment, qui est d’une richesse folle. Plus tard, je me suis aussi un peu plus intéressé à la politique, le fujimorisme, l’époque du terrorisme, etc. » Un jour, il se balade avec son père dans les rues de Lima. Il a quatre ans. Un besoin pressant les pousse à écourter leur trajet pour rentrer directement chez sa grand-mère. Quand ils arrivent, ils apprennent qu’un attentat à l’explosif a détruit l’immeuble dans lequel ils pensaient se rendre…

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À Bruxelles, le paternel poursuit l’éducation musicale du fiston en l’emmenant chaque semaine à la médiathèque. Un jour, Diego tombe sur l’album Homework de Daft Punk. « Ma première grosse claque. J’avais neuf ans. » Il est également fan de radio. À quatorze ans, il débute à la régie d’une petite radio locale, Radio Air Libre, avant de proposer ses premières chroniques, et d’avoir sa propre émission, baptisée Electrochoc, « référence au livre de Laurent Garnier ». Là, il croise tous les acteurs de la scène électronique belge, qui vont bientôt lui mettre le pied à l’étrier. A 17 ans, il se retrouve à mixer un jeudi soir au Dali’s Bar. « Mes parents m’ont fait un mot pour l’école le lendemain. » Il se retrouve aussi sur la guest list permanente des soirées Dirty Dancing, qui agitent alors les nuits bruxelloises. « Je dépassais tous les mecs de 25 ans qui faisaient la file, sans savoir s’ils allaient même pouvoir rentrer » (rires). En même temps que ses études (àqs l’Ihecs), il se retrouve à programmer le club des Halles Saint-Géry, puis Mr Wong, tout en enchaînant les sets DJ. À force, sa culture électronique s’affine et s’affirme. Elle est gourmande, vénérant à la fois l’éclectisme des frères Dewaele ou d’Ivan Smagghe, et percutant sur la house racée de l’écurie allemande Kompakt.

Bagage émotionnel

Cette dernière référence est particulièrement présente sur The Unspoken. « Je me suis toujours dit qu’un album ne devait pas être une suite de singles. Là, tout à coup, j’avais tout un bagage émotionnel important à exprimer. » En l’occurrence, celui de la fin chaotique d’une longue relation amoureuse, dont la musique l’aidera à sortir. La musique, et les « potes », qui, tout le temps, reviennent dans la conversation. « Ils ont toujours été très importants. Mais les circonstances ont fait qu’ils le sont devenus encore davantage. C’est grâce à eux que j’ai pu me reconstruire. C’est pour ça que je les voulais aussi autour de moi pour l’album. » Comme les copains de Joy Wellboy ou l’ami Mirror Minds (alias Anthony Barbarich), présents sur plusieurs morceaux. On en contacte encore deux autres. Harold Boué (aka Abstraxion) est le fondateur du label Biologic, dont DC Salas est devenu l’autre tête pensante en 2012. Depuis Marseille, il répond par mail. « Sortir un premier album est une étape importante. à mon sens, c’est un format qui permet une narration différente, plus profonde. Il y a deux ans, j’ai senti que Diego avait franchi une nouvelle étape dans sa progression musicale et il me semblait important qu’il prenne un temps pour construire et exprimer ce qu’il a en lui. »

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Geoffroy/Mugwump connaît aussi très bien « l’animal ». « La première fois que je l’ai rencontré, ce devait être quand il mixait au Wax. Je me rappelle que ce soir-là j’avais été infect avec lui (rires). Par la suite, je le croisais souvent chez Doctor Vinyl (célèbre disquaire du centre-ville, NDLR). Un jour, il est venu proposer un morceau à Geert (Sermon, patron du magasin, NDLR), qui a fini par le sortir sur son label, avec un de mes remix. C’était Peru… » Aujourd’hui, Geoffroy est devenu l’éditeur de DC Salas. « On s’est retrouvés notamment sur l’éclectisme. Et puis quand tout le monde a plongé dans la deep house, lui est arrivé avec une musique plus dark, moins facile. Là, j’ai assisté à toute la gestation de l’album. Dès les premières maquettes, le son plus planant et mélancolique était là. » Il l’est resté. À la fois vénéneux et organique, sombre et sensible. On n’a pas fini de l’entendre…

DC Salas, The Unspoken, distr. Biologic. ***(*)

En concert e.a. le 22/06 au Rockerill de Charleroi, le 23/06 au festival Paradise City,…

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