Critique | Musique

L’album de la semaine: Robert Plant – Lullaby and… The Ceaseless Roar

Robert Plant © DR
Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

ROCK | Le chanteur de Led Zep poursuit l’exploration de ses fantasmes astro-folk via la narration d’une récente rupture amoureuse. Organique.

L'album de la semaine: Robert Plant - Lullaby and... The Ceaseless Roar

95% des stars ayant triomphé en groupe dans les années 60/70’s, à l’exception notoire des individus Beatles, n’ont mené qu’une carrière solo banale si pas médiocre: Jagger comme Richards (Stones), Roger Daltrey (Who), Dave Davies (Kinks), Eric Burdon (Animals) sans oublier Jimmy Page dont le seul truc un peu bien hors Zeppelin, date de 1998 et l’album Walking Into Clarksdale, conjugué justement avec Robert Plant. Le vocaliste de Led Zep a lui, choisi une route évitant toute nostalgie vintage, refusant l’idée d’une tournée tiroir-caisse après l’exceptionnel concert-réunion londonien de fin 2007. Cette route exploratoire semble culminer avec ce dixième solo, qui doit beaucoup à la complicité musicale nouée avec ses brillants musiciens, le groupe, en partie familier de Plant depuis le début du millénaire, ayant tourné pendant 18 mois avant d’enregistrer. La voie sonore tracée sur des motifs le plus souvent roots est revisitée jusqu’à obtenir une décoction viscérale de folk-blues. Avec une façon de lustrer le vieux Mississippi ou l’ancien Pays de Galles -là où Plant amena Led Zep dans sa phase pastorale il y a plus de quarante ans- comme on ressuscite à sec un costume adoré, espérant lui donner une vie mais aussi une âme supplémentaires.

Seul dans le Sud

Cela fonctionne au-delà de toute espérance, en grande partie par l’intelligence du mix des instruments, que ce soient les velléités rock affirmées en guitares bacchanales (Embrace Other Fall), le fonds cajun d’un violon pressé (Poor Howard) ou ces incisions aériennes, nomades, sahéliennes (Up On The Hollow Hill, Little Maggie). Cette connexion-là passe par le maître d’oeuvre musical, Justin Adams, collaborateur de Plant et producteur de deux albums pour Tinariwen. Le goût du voyage, et pas du tourisme, donne un gumbo mondialiste et culotté, culminant avec une grand-messe bollywodienne encensée aux sequencers (Arbaden). Sur cette musique fertile, Plant promène des chansons où il fait part de la fin d’une histoire d’amour -avec la chanteuse américaine Patty Griffin- qui l’avait mené à vivre (partiellement) à Austin, Texas. D’où la limite de la douleur et du retour d’exil transformée en ballades mercuriales (A Stolen Kiss, House Of Love). Il y a aussi ce moment unique dans Turn It Up où le sexagénaire dresse le décor alors qu’il conduit seul sa bagnole dans le grand Sud: « I’m lost in America/I’m turning Inside out/I’m turning into someone else. » Plant surprend par la tranquillité charnelle de son débit et les nuances d’un talent vocal indépendant des virtuoses exploits chantés d’antan. Résultat: un disque vibrant, moderne, contemporain, à la page. Sans Page. Toute la nuance est sans doute là.

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