Critique | Musique

[L’album de la semaine] Daughter – Not to Disappear

Daughter © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

ROCK | Trois ans après son premier essai, Daughter réussit à donner une ampleur supplémentaire à ses humeurs désenchantées.

Quand le premier album de Daughter a paru en 2013 (If You Leave), il n’y avait pas forcément grand monde pour parier sur le succès du trio londonien. Un single a toutefois fait la différence. Intitulé Youth, le morceau avait tout de l’hymne générationnel désenchanté –« We are the reckless/We are the wild youth ». Le morceau validait le spleen essentialiste de l’adolescence comme peu l’avaient fait ces dernières années. « And if you’re still bleeding, you’re the lucky ones/’Cause most of our feelings, they are dead and they are gone », chantait Elena Tora, de sa voix blanche, ajoutant: « We’re setting fire to our insides for fun »

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L’incendie a bien pris, que ce soit dans des séries télé ou via des reprises par des candidats branchés de télécrochet, type Nouvelle Star. Qu’un morceau aussi désabusé s’accommode des paillettes du petit écran peut faire sourire. La principale intéressée, elle, n’en prend pas spécialement ombrage. Rencontrée il y a quelques semaines, aux côtés de ses deux camarades, le Suisse Igor Haefeli (guitare) et le Français Remi Aguilella (batterie), Elena Tonra explique: « On s’est également retrouvés à jouer dans des festivals, où les gens reprenaient le morceau en choeur, comme une chanson scoute. C’est étrange, mais cela me convient. Je ne suis pas précieuse envers mes morceaux. Je sais d’où ils viennent: c’est un peu comme si mon corps me poussait à expulser ces pensées toxiques. Mais une fois qu’elles sont sorties, je me sens libérée. Elles ont été transformées en quelque chose d’autre, plus beau, qui ne m’appartient plus vraiment. »

Trois ans plus tard, Daughter revient donc avec un nouvel album, qui s’appuie à la fois sur la confiance acquise grâce à la reconnaissance du public (et de la critique), mais aussi sur les tourments qui ont immanquablement suivi. On sort rarement indemne de plusieurs mois de tournée aux quatre coins du monde. « J’ai commencé à avoir peur quand, en me réveillant chez moi, j’ai voulu appeler le room service », rigole Remi Aguilella. Entre-temps, le couple formé par Tonra et Haefeli a aussi explosé en vol. Le trio, pourtant, a tenu bon, tentant plusieurs formules. Tonra: « Avec le premier album, on nous avait collé une série d’étiquettes différentes: folk, rock, post-ceci, post-cela… Du coup, on était très à l’aise pour tenter à peu près ce qu’on voulait, quitte à se déchirer après sur la direction à prendre. »

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Ecrire que le nouvel album marque une rupture serait toutefois exagéré. New Ways, par exemple, est moins un renouvellement de façade qu’un approfondissement -seul un morceau comme Fossa amène le groupe vraiment ailleurs (sur les terres de Florence + The Machine, à peu de choses près). En cela, fidèle à l’esthétique glacée de leur label (4AD, patrie historique des Cocteau Twins et autres Dead Can Dance), Daughter continue de creuser une veine mélancolique: celle d’un rock sépulcral et plombé, qui fera du bien là où ça fait mal, malaxant les états d’âme d’une génération dont l’hyperconnexion rend la solitude encore plus douloureuse.

DISTRIBUÉ PAR 4AD.

EN CONCERT LE 10/02, À L’ANCIENNE BELGIQUE, BRUXELLES.

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