Critique | Musique

L’album de la semaine: Arthur – Dreams and Images

Arthur © DR
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

FOLK | Le hautement recommandable label Light in the Attic réédite un prodigieux protégé de Lee Hazlewood à la carrière fugace et à la fin tristement romantique.

Le 10 janvier 2002, alors que sa femme Lora vient de décéder quelques heures plus tôt dans un terrible accident de la route, Arthur Lee Harper est emporté par une crise cardiaque tandis qu’il appelle famille et amis pour les prévenir de la terrible nouvelle. L’événement aura moins agité la presse musicale que les canards locaux. Et pour cause. Arthur est encore aujourd’hui un anonyme. Un nobody de l’industrie du disque. Loser, pas encore beautiful, qui a tiré un trait sur sa carrière de singer songwriter après deux splendides et touchants albums folk publiés à la fin des années 60 par Lee Hazlewood et son label LHI Records.

Natif de Floride, Arthur s’installe à Hollywood, porté par ses rêves de carrière dans l’industrie musicale et vit au jour le jour dans un YMCA avec Mark Lindsey Buckingham et Stephen John Kalinich (également réédité récemment par Light in the Attic). Si Kalinich signe à l’époque sur Brother Records, le label des Beach Boys (il se fera d’ailleurs produire par Brian Wilson), Arthur s’allie lui à Lee Hazlewood après avoir frappé à la porte de sa maison de disques sur Sunset Boulevard. Le pygmalion de Nancy Sinatra le définit comme « un homme qui un jour redeviendra un enfant. Une raison de pleurer et de ne pas avoir peur. Un oiseau avec des croches (de musique, ndlr) à la place des ailes. »

Les deux musiciens entrent en studio accompagnés de Donnie Owens, de Tom Thacker et de Don Randi, l’arrangeur qui apportera aux treize petites merveilles de Dreams and Images toute leur « grandeur » baroque. « Arthur avait du mal à accoucher de ses idées, dira ce dernier. Alors il me chantait les mélodies qui lui trottaient dans la tête. »

Sunshine soldier

Cheveux blonds au bol, oeil perçant et triste. Sur la pochette de son premier album, magique et aérien, de folk psychédélique (pour la première fois sur un CD qui lui est propre et accompagné de trois titres inédits), Arthur ressemble à la fois -chacun ses références-, à cette grande folle de Dave et à l’ex-Rolling Stone Brian Jones, tombeur de ces dames drogué jusqu’à la moelle et mystérieusement retrouvé noyé dans sa piscine. Rêveur, idéaliste, « Arthur n’était que paix, amour et harmonie. De ceux convaincus qu’on peut changer le monde », dira l’un de ses vieux amis.

Des pépites de chansons telles que Children Once Were You et Sunshine Soldier vous le feraient croire sur parole. La voix angélique d’Arthur y joue à cache-cache avec le timbre émouvant d’un Tim Buckley sur des musiques délicates, gentiment psychédéliques et médiévales. Filant la chair de poule tout en réchauffant les coeurs…

Après Love is the Revolution, Arthur a quitté le monde de la musique pour embrasser celui du christianisme, se concentrer sur sa famille et entamer une carrière d’ingénieur de fusée, puis d’enseignant. Une compilation de raretés immortalisées entre 1967 et 1970 intitulée Memories a déjà vu le jour. Mais sachant qu’il n’a jamais arrêté d’écrire et d’enregistrer, que ce soit dans des studios ou chez des amis (« singing and songwriting is like breathing », disait-il), on remettra peut-être tôt ou tard la main sur d’autres trésors cachés de ce roi Arthur, « hippie » et pacifiste.

  • DISTRIBUÉ PAR LIGHT IN THE ATTIC.

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