It It Anita, génération MTV

© GERT-JAN DE BAETS
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Enfants des années 90 biberonnés aux clips indé d’Alternative Nation, les Liégeois d’It It Anita racontent un album so nineties, Agaaiin, et leur retrouvailles avec John Agnello.

Veille de Noël. Les Balades Sonores. Dans ce qui était jadis une librairie, entre les oeuvres squelettiques et flashy d’Elzo Durt et une sélection pointue de vinyles avec des compartiments chelous, genre « France also had keyboards and made sad synth songs« , Damien Aresta s’installe pour raconter le dernier It It Anita et retracer brièvement son parcours bien chargé de trentenaire hyperactif. Dans ses autres vies, Damien a cofondé JauneOrange, joué avec Zythum, Airport City Express et Hank Harry, ouvert un studio de création graphique (Please Let Me Design) et conçu des pochettes pour Flexa Lyndo et Sold Out… Aujourd’hui, le barbu qui s’est fait tatouer ROLEX sur le poignet et des copies conformes des dessins de ses gosses un peu partout sur le corps, est à la tête de Luik Records (il a rendez-vous dans la foulée avec Sale Gosse, ses nouveaux petits protégés). Il rend l’art accessible à tous grâce à sa petite structure d’édition Ding Dong Paper, propose un podcast mensuel, L’Émission avec des images, sur Radio Rectangle, et surtout déclenche avec Michaël Goffard les déflagrations électriques d’It It Anita. « En 2012, autour d’une bière, lors d’un concert de BRNS et de Carl à Liège, on s’est mis en tête de faire un truc ensemble. On partageait les mêmes goûts et Mike avait envie de se lancer dans un projet un peu plus costaud que Malibu Stacy. Il avait déjà monté Les Singlets mais une semaine après, on se retrouvait pour répéter. On s’est d’abord fait appeler Jeudi Matin. Parce que c’était le jour de nos rendez-vous hebdomadaires. »

Des boucles, un peu de noise, des boîtes à rythme… Le tandem s’oriente d’emblée vers un rock radical et expérimental bâti sur son amour inconditionnel pour Mogwai et Sonic Youth… « Un bassiste et un batteur nous ont rejoints pour un concert et ils sont restés dans le groupe pendant deux ans jusqu’à ce qu’ils abandonnent le projet l’année passée. Les nineties, c’est la musique avec laquelle on a grandi. À l’exception de Bryan (ex-Eté 67), on est tous nés en 1978 ou 1979. On est des enfants de MTV et d’Alternative Nation. De la musique des années 90. Puis moi qui suis passionné par l’image, j’étais gâté. Les clippeurs de l’époque s’appelaient Michel Gondry, Spike Jonze. J’enregistrais tout ça sur des cassettes vidéo.« 

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Les Liégeois assument tellement la filiation qu’ils ont appelé leur deuxième EP Recorded by John Agnello. Soit le collaborateur de Sonic Youth, des Screaming Trees ou encore de Dinosaur Jr avec qui ils l’avaient enregistré. « Pamela Hute, une chanteuse parisienne, a écouté nos premières chansons et m’a conseillé de le contacter. John a trouvé ça super et il a accepté de venir en Belgique pour la toute première fois de sa vie. Il avait déjà travaillé avec un Belge, Admiral Freebee, mais ce dernier était parti aux Etats-Unis. Tout seul. Sans rien. John lui avait trouvé des musiciens dans le quartier: J Mascis, Steve Shelley… Enfin bref, s’il ne connaissait rien du pays, il est venu et ça s’est super bien passé. On a été le chercher à la gare. On l’a embarqué manger un boulet. Puis on l’a emmené au studio dans la campagne liégeoise. Il a juste vu les Guillemins, les boulets et il est resté à Sprimont pendant cinq jours. »

À nouveau fabriqué avec John Agnello, Agaaiin a cette fois été enregistré près de chez lui. Au Watermusic Studio, à Hoboken. Dans le New Jersey mais à une demi-heure à peine de New York. Un endroit où ont entre autres bossé Pavement, Yo La Tengo, Beyoncé… « Noir Désir y a enregistré un bout de Des visages des figures. Le boss nous expliquait que dix jours avant l’arrivée du groupe, des flight cases énormes étaient arrivés. Il pensait que c’était leur matos mais en fait, c’était des bouteilles de vin. Les mecs étaient partis là-bas avec leur pinard. Ils sont de Bordeaux en même temps… J’imagine que le vin c’est important, qu’ils voulaient pas boire de la piquette américaine.  »

Clins d’oeil

It It Anita, génération MTV

Les It It Anita, eux, sont partis aux USA les mains vides. Sans même leurs instruments. « Le son a pas mal évolué depuis l’album précédent. Notre ancien bassiste d’ailleurs ne se retrouvait plus vraiment dans les nouvelles compos. C’est plus simple. Direct. Alors que lui vient du math rock. De bazars assez complexes. L’envie était malgré tout de continuer à expérimenter. Il y a ainsi des interludes noise qui ne sont que des agencements de bruits et qu’on a fabriqués nous-mêmes en Belgique quelques mois après. »

Le mixage a lui eu lieu au Magic Shop, mythique studio de Manhattan où ont sué Bowie, Lou Reed, Norah Jones, Suzanne Vega, les Foo Fighters ou encore les Ramones, et que les Liégeois sont les derniers à avoir réservé avant fermeture. « Recorded with John Agnello était un clin d’oeil à un groupe français qui s’appelle Enregistré par Steve Albini. Eux voulaient enregistrer un disque avec le producteur des Pixies et de Nirvana. Ils l’ont fait. Et maintenant, le groupe n’existe plus. Nous, avec John, on a remis ça et l’album s’appelle Agaaiin. Je suis graphiste. J’aime les concepts. Je trouvais que ça claquait un peu. J’aime bien jouer avec les mots, faire des blagues qui n’en sont pas vraiment.  »

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Sonic Youth, Queens of the Stone Age, At The Drive-In, Pixies, Metz, Suuns… Agaaiin est aussi fourni en références qu’en clins d’oeil. Que ce soit dans sa pochette ou le titre de ses chansons. 25 (From Floor to Ceiling) fait écho à un groupe marseillais, 25, avec qui It It Anita a joué à Mouscron. Jean-Marc est le prénom du propriétaire de ses anciens locaux de répète. « Gingembre, panais, betterave… Au début, tous nos titres de travail étaient des noms de légumes et la démo s’appelait Raaciine. Turmp, par exemple, ça vient de Turnip (navet). Le n et i fusionnés forment un m et l’anagramme de Trump. » God Bless It It Anita…

It It Anita, Agaaiin, distribué par Luik Records. ***(*)

Le 09/02 au Botanique avec Future of the Left.

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