Horreurs, bonheur!

En 2011, les échalas blafards de The Horrors arrondissent les angles mais en ont toujours dans le falzar. Démonstration hier soir à l’Ancienne Belgique de Bruxelles…

Il y a 4 ans, on ne donnait pas cher de la peau de The Horrors, épouvantails goths nés de la dernière hype. En 2011, n’empêche, le groupe, vilain petit canard de la branchitude rock, est toujours là. La raison: la bande à Faris Badwan a bon goût, et revisite à chaque album un pan entier de sa discothèque d’esthètes un peu lopettes. Les Cramps et les Sonics passaient à leur moulinette garage-surf-punk sur un premier album, Strange House, plutôt réjouissant en 2007. Horreurs, bonheur! Joy Division et la clique cold wave-shoegaze subissaient un relifting carrément bandant en 2009 sur l’impeccable Primary Colours. Tandis que le Madchester baggy des Stone Roses était revisité cet été le temps de Skying, smiley gentiment acid qui voyait les gaillards détourner leurs regards du bout de leurs pompes pour lever les yeux au ciel (et un peu vers les Psychedelic Furs voire… Simple Minds aussi): plaisir, là encore, même si un peu coupable pour le coup. Chez The Horrors, on n’a pas inventé la poudre mais on sait définitivement comment la faire parler.

Démonstration encore ce jeudi soir à l’AB où les lascars délivrent leur rock sous influence avec autant de pose que d’énergie. Ce qui situe quand même très haut le quotient énergétique du machin. Pourtant, en ouverture, Changing the Rain semble donner le ton, celui d’un trip lysergique soft, d’un psychédélisme de salon, avec le vieux sofa défoncé où il fait bon s’affaler en option. Mais I Can See Trough You, genre d’hymne de stade de bon goût (le groupe n’est pas à un paradoxe près…), muscle les débats avec une section rythmique qui claque, judicieusement mise en avant histoire de booster la voix de junkie halluciné de Badwan. Entre les deux, Who Can Say, et son gimmick spoken piqué au sixties Jay and the Americans, marque l’une des rares incursions dans le passé discographique du band briton. Même si, entre l’excellent Endless Blue, tout en accélérations, et le single Still Life, qui assure le minimum syndical façon Jim Kerr plus ou moins mal peigné, c’est bien le dantesque Sea Within A Sea de 2009, et sa montée orgasmique, qui fait l’effet d’une bombe, et constitue le sommet de la soirée. Du moins le croit-on alors, dans l’attente d’un rappel vraisemblablement assuré en pilote automatique. C’était sans compter sur un final à rallonge hypnotique et bruitiste où Les Horreurs, sales et méchants, prennent un malin plaisir à étirer leur Moving Further Away dans tous les sens. En résulte un truc vicieux, crasse, rampant, drogué, qui prend au ventre et explose les sens, laissant l’AB groggy, pour ne pas dire K.O. debout.

N’en déplaise aux tenants d’un certain intégrisme indie, en 2011 The Horrors reste un groupe foutrement crédible.

Nicolas Clément

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