Critique | Musique

Ghost Stories de Coldplay, le disque fantôme d’un groupe absent

Coldplay © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

POP | Pour son 6e album, Coldplay se prend les pieds dans sa production chamallow, et donne surtout l’impression d’un groupe absent de son propre disque…

Ghost Stories de Coldplay, le disque fantôme d'un groupe absent

La pop est une grande causerie. Un salon où l’on déblatère à tort et à travers -s’il en fallait encore une preuve, il suffit de consulter Twitter: sur ses dix comptes les plus populaires, sept sont attribués à des musiciens (les trois autres sont ceux de YouTube, Instagram et… Barack Obama). La pop ressemble à un café des sports où l’on refait le match à chaque tournée, les héros des uns étant les têtes à claques des autres. Coldplay en est l’illustration parfaite. Habitué à remplir des stades, le groupe a forcément ses supporters, et au moins autant de « haters »: il n’est jamais « cool » d’aimer un groupe qui a vendu 70 millions d’albums, même/surtout quand son chanteur est pote avec Jay-Z et Beyoncé… Des groupes ayant émergé au début des années 2000, Coldplay n’en reste pas moins aujourd’hui le seul à tenir toujours le haut du pavé. Il y est arrivé en enchaînant une série de tubes soft-rock aux eaux parfois si calmes et polies qu’il était finalement très facile d’y voir son reflet -et c’est aussi ça, parfois, le génie d’un hit: être assez ouvert pour servir de refuge aux émotions les plus universelles (quitte à glisser vers la platitude). En d’autres mots, vous pouvez ne pas aimer Coldplay. Mais il sera difficile de nier avoir jamais vécu de situations où un titre comme In My Place ou même Every Teardrop Is A Waterfall ne pouvait pas faire écho…

Gueule de bois

Il ne faudrait pas l’oublier au moment de discuter Ghost Stories, sixième album studio du groupe, qui porte bien son nom: un disque fantôme d’un groupe absent. Car ici les eaux ne sont plus seulement calmes, c’est carrément la mer Morte. Il y a un peu plus de deux mois, Chris Martin annonçait la fin du couple qu’il formait avec Gwyneth Paltrow. Ghost Stories refléterait ainsi les temps troublés qu’a traversés le chanteur. Mais sans jamais réussir à les « magnifier ». Ce ne sont pas les sentiments éprouvés qui sont ici en cause -tout le monde a le droit de traîner une gueule de bois-, mais l’incapacité à les traduire, comme paralysé.

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Tout n’est pas vain. Le single Magic -sa basse ronde, son minimalisme électronique- est même des plus réussis. Produit par Jon Hopkins, Midnight est une superbe méditation, mélancolie planante hantée par la voix « vocoderisée » de Martin. Le titre vient aussi rappeler que le groupe, aussi attendu soit-il, est encore capable d’essayer des choses, de prendre des risques et de sortir de sa zone de confort. On pourrait tenir le même discours concernant A Sky Full of Stars. Produit par Avicii, le single est cependant un plantage intégral, mélangeant les tics EDM les plus purulents avec le pire de la pompe stadium rock. Ce qu’il avait réussi sur Princess of China (avec Rihanna, meilleur titre de Mylo Xyloto), Coldplay le plante ici complètement. Une abomination.

Il serait injuste de résumer Ghost Stories à ce ratage. Coldplay a toujours pratiqué la pop chamallow, et à certains égards, il revient même ici aux sources (Oceans aurait pu trouver sa place sur Parachutes). Mais l’implication (et les chansons) en moins.

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