Funestes mais joyeux, The Daredevil Christopher Wright

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Fanfare de cimetière, orchestre pop d’hôpital, The Daredevil Christopher Wright charme avec ses chansons folk souvent barrées et bancales qui parlent de mort et de cancer tout en se fredonnant facilement sous la douche.

« I died on the way to the hospital. I died. You cry all the way from the funeral. » Faut pas avoir fait philo ou langues étrangères pour comprendre qu’avec The Daredevil Christopher Wright, on est à 1000 lieues de la Danse des canards, de Tata Yoyo et du Petit Bonhomme en mousse. Les textes des trois Américains sont plutôt du genre plombés.

Toutes nées d’expériences réelles plus ou moins personnelles, Hospital, Bury You Alive et leurs petites soeurs parlent d’idées noires, de situation extrême, de mort et de cancer… De quoi donner des envies de corde, de roulette russe et, au hasard, de gaz d’échappement. Sauf que les barbus du Wisconsin mettent leurs pensées en musique avec pas mal de décalage et de légèreté. Leur marche funèbre à eux, c’est un peu l’enterrement qui bascule tout doucement vers l’hilarité générale dans Les Nouveaux monstres (le film à sketchs de Monicelli, Risi et Scola). Les paroles du trio ont beau être noires, sans beaucoup d’espoir, ses arrangements, eux, se font lumineux, décomplexés. Voire parfois franchement joyeux.

« L’un des groupes qui devait jouer avec nous a annulé. Un décès dans la famille », glissent les Yankees comme pour renforcer leur funeste réputation alors qu’on taille la causette au Cake Shop. Une petite salle de concerts new-yorkaise du Lower East Side… Quand on cherche des infos sur ce casse-cou de Chris Wright, il faut évidemment faire le tri. Des homonymes, on en dénombre déjà une dizaine ne serait-ce que sur Wikipedia. Parmi eux un catcheur, un joueur de cricket et un dissident anglais du XVIe siècle auteur d’une conspiration ratée contre le roi James 1er.

« Notre Christopher Wright à nous, on en avait une photo dans le temps, rigole Jason Sunde. C’est un petit garçon avec un sac à dos. Prêt à prendre la route. A chercher et trouver la grande aventure. Et peut-être bien en fait à se casser de chez lui. »

Le disque qui tombe à pic

Jason est l’aîné. Puis aussi le dernier à avoir quitté son emploi pour faire de la musique. Ses problèmes dorsaux ont soufflé au trio le titre de l’album, In Deference to a broken back, mais The Daredevil Christopher Wright reste avant tout le projet de son frangin, Jon, cinq ans de moins sur la carte d’identité. Grand fan d’Elliott Smith, de la manière douce amère avec laquelle le suicidé évoquait les faces les plus sombres de nos existences, Jon, dixit la bio du groupe, a étudié le chant classique, joue au tennis et n’aime pas les fruits dans les desserts.

« A ce que je me souvienne, notre père a toujours été dans le milieu, dit-il ainsi. Il tournait avec un groupe itinérant chrétien. Jouait dans des énormes conventions devant des tas de gosses. J’ai toujours voulu avoir mon groupe moi aussi. » Le pater s’est chargé du reste. A incité ses fistons à faire de la musique ensemble. Et on ne peut que l’en remercier. « En grandissant, je n’ai jamais manqué de rien. C’est peut-être pour ça que j’ai commencé à me fasciner pour la mort et à m’exprimer sur ce sujet. Elle permet d’exorciser, d’explorer la perte, les maux de ventre et de coeur. Une chose très courante dans l’écriture et dans l’art en général. »

Ce qui semble moins courant, et encore, c’est que le groupe complété par Jessie Edgington, batteur bricoleur qui pique des sweat-shirts à son grand-père, vient d’Eau Claire. Une ville de 60.000 habitants où les musiciens poussent comme la mauvaise herbe. « Il s’agit d’une petite communauté. On connaît Justin Vernon (Bon Iver) et les mecs de Megafaun depuis des lustres. J’étais en ville depuis à peine une semaine que j’assistais à un concert de leur ancien groupe De Yarmond Edison. »

Vernon a d’ailleurs mixé le premier album des casse-cou. Un disque qui, même un an après sa sortie aux Etats-Unis, continue de tomber à pic.

Mother Mary, un petit titre pieusement offert par le groupe à Noël 2009:

Mother Mary by The Daredevil Christopher Wright

The Daredevil Christopher Wright, In Deference to a Broken Back , distribué par Munich.
En concert à la Maison des musiques (Bruxelles) dans le cadre du festival Comme à la Maison, le 02 octobre à 19h40.
Plusieurs titres de l’album à écouter sur le myspace du groupe.

Julien Broquet, à New York

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