Critique | Musique

Ebo Taylor – Life Stories

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AFROBEAT | Une double compilation rend hommage à Ebo Taylor, légende vivante de l’afro funk ghanéen. Eh bien dansez maintenant!

C’est l’histoire d’une vie bien chargée passée au service de la musique africaine. L’histoire inachevée d’un homme qui fut, durant les années 50 et 60, heures de gloire du high-life, l’un des maîtres des nuits ghanéennes. Phénomène intimement lié au colonialisme, tendance à l’imitation ou plutôt à l’appropriation voire au détournement de standards occidentaux, le high-life naît dans les années 20 de la rencontre des guitares portugaises, des fanfares occidentales, des rythmes africains, des big bands américains et de styles caraïbéens comme le calypso.

Ebo Taylor, puisque c’est de lui dont on parle ici, se fait la main avec des big bands comme le Broadway Dance Band et les Stargazers. Monté en grade, il part étudier à Londres en 1962. Avec le Black Star Highlife Band, constitué essentiellement d’étudiants en musique et patronné par le Haut Commissariat du Ghana, Taylor tente d’incorporer le jazz dans le high-life. De retour au pays, il devient arrangeur et producteur pour des labels comme Essiebons et se met au service des stars ghanéennes.

Irrésistible double compilation de 16 morceaux qui s’étendent sur plus d’une heure et demie, Life Stories s’intéresse aux « classics » high-life et afrobeat sur lesquels Taylor a bossé entre 1973 et 1980. Des titres enregistrés avec le CK Mann Big Band (Etuei) et Pat Thomas, surnommé The Golden Voice of Africa (Ene Nyame ‘A’ Mensuro). Puis d’autres issus de ses albums solos et de certains projets persos plus discrets comme l’Apagya Showband (Kwaku Ananse), Asaase Ase (Ohiani Sua Efir), Super Sounds Namba (Yes Indeed) et autres Pelikans (Egya Edu).

La classe internationale

En retraçant une petite décennie dans la vie mouvementée d’Ebo Taylor, Life Stories explore la fusion des sons ghanéens traditionnels, de l’afrobeat de Fela Kuti, du jazz, de la soul et du funk. Un grand chaudron qui groove, délie les jambes et déride les visages fermés d’occidentaux. C’est rempli de cuivres, plein de bonnes vibes… Impossible de résister aux 15 minutes Aba Yaa et à cette référence majeure, même si pas la plus célèbre, de l’histoire du beat afro…

Après quelques apparitions sur des compilations comme Ghana Soundz de Soundway Records et autres mix d’Analog Africa, le septuagénaire avait l’an dernier sorti un nouvel album, Love and death, histoire disait-il de promouvoir l’afrobeat et de perpétuer l’héritage de Fela. Accompagné par le collectif berlinois Afrobeat Academy, des membres de Poets of Rhythm, de Kabu Kabu et de Marijata, il jouissait enfin pour la première fois, après plus de 60 ans de carrière, d’une diffusion internationale de son travail.

Alors, si on vous dit qu’Usher a samplé un riff de l’incroyable Heaven dans son abominable She Don’t Know avec Ludacris, c’est juste pour l’anecdote. Life Stories se chargera de la postérité.

Ebo Taylor, Life Stories , distribué par Strut.

Julien Broquet

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